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QUELLE PROTECTION POUR L’ENFANCE AFRICAINE ?
« Les conflits armés
continuent d’hypothéquer la vie de milliers d’enfants,
tuant, mutilant et détruisant l’enfance. Sur les 300.000
enfants-soldats recensés dans le monde, on estime que 120.000
sont africains. Dressés pour tuer, la personnalité de
ces jeunes se construit entièrement sur la base de la violence
et de la terreur. Ces dernières années, une prise de conscience
s’est réalisée, tant au niveau international qu’au
niveau du continent africain, pour mettre fin à l’utilisation
d’enfants combattants et les aider à se réinsérer
après les conflits », constate Me Adama Dieng sous Secrétaire
général de l’ONU, Greffier du Tribunal International
pour le Rwanda. (Ici un raccourci de sa communication à l’occasion
du colloque de Dakar sur « Images de l’Afrique et Culture
contemporaine »organisé par le Centre d’Orientation
et d’Etudes Africaines (Centro Orientamento Studi Africani –
(COSA), ( Les sous - titres sont de la rédaction) |
« Si aucune région du monde n’échappe au constat de violations ou de négligences largement répandues des droits de l’enfant, la situation des pays africains reste une sérieuse préoccupation. Les enfants africains forment à eux seuls près de la moitié des habitants du continent et restent les plus marginalisés, peut-être parce qu’ils sont les plus nombreux, mais aussi les plus démunis. La précarisation de leurs droits se trouve dans l’environnement économique difficile d’une part, et dans les conflits politiques qui déstabilisent l’espace politique, d’autre part.
Le comble du paradoxe est fait que les Etats du Continent les plus pourvus en ressources minières et naturelles sont ceux qui accordent le moins de protection aux enfants. Le passé comme le présent de ces enfants sont remplis de violences diverses. Exposés à la brutalité des conflits qui ravagent le continent, mais aussi à l’exploitation et au trafic, beaucoup sont privés d’éducation et sont vulnérables à la malnutrition et à la maladie.
Quant à l’avenir de la jeunesse africaine, beaucoup de jeunes le scrutent avec un profond sentiment d’incertitude et d’inquiétude. Les perspectives sont assombries par les nombreux dangers qui menacent de rendre leur vie incertaine. Qu’il s’agisse du cycle endémique des violences armées, de la propagation du sida et autres pandémies, ou encore des effets négatifs des politiques d’ajustements structurels et des piéges de la mondialisation, ce sont autant de facteurs qui hypothèquent l’avenir de la jeunesse africaine.
Les statistiques sur la situation chaotique des enfants d’Afrique sont alarmantes. On reconnaît l’ampleur et la complexité du travail des enfants, mais c’est l’explosion du phénomène qui pose un redoutable défi. C’est avec ce contexte pour toile de fond que l’on doit poser la question fondamentale du devenir de cette enfance, étroitement liée à la question du devenir du continent lui-même, tant il est vrai que ces jeunes seront les adultes qui formeront demain les forces vives de la région.
Or, à cet égard, il est un paradoxe qui saute immédiatement aux yeux. En effet, ces dernières années ont été marquées par une mobilisation internationale, forte et consensuelle, en faveur de la protection de l’enfance. Cette manifestation d’une plus grande conscience de l’importance des droits de l’enfant pour le futur des sociétés en général, et des sociétés africaines en particulier, a conduit à l’édification d’un solide arsenal juridique ambitionnant d’offrir un meilleur avenir aux enfants.
Pourtant, le contraste demeure saisissant entre la robustesse de l’ossature
juridique visant la protection de l’enfance d’une part et, d’autre
part, l’extraordinaire fragilité des conditions d’existence
de la grande majorité des enfants africains. Le paradoxe veut que l’enfant
africain se retrouve aujourd’hui comme « égaré »
entre l’inflation de l’idéal normatif et l’effroyable
dégradation de ses conditions de vie. Plusieurs défis majeurs
restent à relever pour lui assurer un avenir moins incertain.
Malgré une dynamique juridique et diplomatique sans précédent
dans la proclamation et l’édification de normes protectrices
de l’enfance, pour la grande majorité des enfants africains,
les promesses restent encore à honorer. La position commune africaine
identifie en particulier deux obstacles : l’un mondial et global, tenant
à la crise sociale et économique que subissent actuellement
les pays africains ; l’autre spécifique et local, tenant à
certains effets néfastes des cultures traditionnelles.
Il y a urgence aujourd’hui à agir pour créer un cercle
vertueux permettant d’honorer les promesses faites aux enfants. L’urgence
se vérifie d’autant plus que le traitement qu’une société
réserve à ses enfants peut être considéré
comme un indicateur fiable de ce que cette société se réserve
comme avenir.
Le débat sur la protection de l’enfance africaine est resté
une question majeure pour les instances africaines même si les résultats
obtenus restent globalement négatifs.
Nous pensons qu’il faut mettre la protection des enfants au cœur
des préoccupations actuelles de l’Afrique. Nous serons naturellement
conduits à mettre l’accent successivement sur la nécessité
de mettre les enfants à l’abri de la misère économique,
réaliser le droit à l’éducation et à la
santé, et enfin mettre fin à l’utilisation des enfants-soldats.
Pour le premier point consacré aux droits des enfants, il faut rappeler
que le droit à l’éducation ne doit pas être considéré
comme un luxe qui ne serait réalisable qu’une fois un certain
niveau de développement atteint. Après certaines améliorations
dans les années 70 et 80, le domaine de l’éducation a
connu des reculs, avec notamment une insuffisance des équipements scolaires,
une surpopulation dans les classes et l’érosion de la qualité
de l’enseignement.
A la Session extraordinaire de l’Assemblée générale
des Nations Unies, en Mai 2002, la Communauté des Etats membres s’était
résolument engagée à briser l’engrenage intergénérationnel
de la malnutrition et du délabrement de la santé en apportant
des améliorations qui permettront à tous les enfants de prendre
un bon départ dans la vie. Des progrès sensibles ont été
constatés dans certains domaines, mais l’amélioration
de l’état de santé général des enfants africains
est menacée de stagnation, voire de recul, par l’ampleur sans
précédent de la malnutrition et de la pandémie du VIH/sida
sur le continent.
Force est de constater que la misère économique est, et demeure,
un obstacle majeur à la satisfaction des besoins et à la protection
de l’enfance. Les enfants constituent, en effet, une population particulièrement
vulnérable à la pauvreté.
Les statistiques mondiales montrent que le travail des enfants connaît
une forte croissance. Cette main-d’œuvre est très recherchée
au point qu’elle fait l’objet d’un trafic qui s’apparente
à une véritable traite d’esclaves. La région Asie-Pacifique
enregistre le plus grand nombre d’enfants actifs dans la tranche d’âge
5-14 ans (127,3 millions), suivie par l’Afrique sub-saharienne (48 millions)
et l’Amérique Latine (17,4 millions). En revanche pour le nombre
d’enfants actifs par rapport à la population enfantine totale,
l’Afrique sub-saharienne avec 29% devance largement le continent asiatique
qui compte 19%.
Enfin pour le second point sur l’utilisation d’enfants-soldats,
il faut noter que les conflits armés continuent d’hypothéquer
la vie de milliers d’enfants, tuant, mutilant et détruisant l’enfance.
Sur les 300.000 enfants-soldats recensés dans le monde, on estime que
120.000 sont africains. Dressés pour tuer, la personnalité de
ces jeunes se construit entièrement sur la base de la violence et de
la terreur. Ces dernières années, une prise de conscience s’est
réalisée, tant au niveau international qu’au niveau du
continent africain, pour mettre fin à l’utilisation d’enfants
combattants et les aider à se réinsérer après
les conflits.
Les conflits modernes ont la particularité d’impliquer le maximum
d’enfants dans les hostilités. Les enfants sont généralement
manipulés et encouragés à commettre des actes dont la
gravité leur échappe. Devant l’ampleur du désastre,
il faut nécessairement élaborer un Plan d’action visant
à promouvoir le principe de non recrutement et de non participation
des enfants de moins de 18 ans en cas de conflit armé. Les moyens mis
en œuvre pour éradiquer ce fléau restent malheureusement
modestes et l’ampleur des besoins nécessite que la communauté
internationale tout entière s’unisse dans un effort commun. Les
enfants soldats sont des engagés ou des volontaires pour combattre.
La Charte des droits et du bien-être de l’enfant lève toutes
les ambiguïtés de la distinction entre recrutement obligatoire
et engagement volontaire. L’article 22 de la charte dispose que les
Etats parties prennent toutes les mesures nécessaires pour veiller
à ce qu’aucun enfant ne prenne directement part aux hostilités
et en particulier, à ce qu’aucun enfant ne soit enrôlé
sous les drapeaux. Il ne fait guère de doute que cette définition
de l’enfant reste l’une des plus avancées du droit international.
Pour majeure que puisse paraître cette définition de l’enfant,
peut-on pour autant considérer qu’elle a marqué un tournant
décisif à la faveur duquel la protection des enfants africains
se serait subitement améliorée ? il est permis d’en douter,
tant il vrai qu’une convention internationale n’a jamais été
une panacée. La spécificité proclamée n’est-elle
pas alors une simple illusion ? A moins qu’elle ne soit davantage dans
le dit que dans l’écrit, car entre le verbe fugace et son expression
écrite, s’insinue bien souvent l’écran de l’indicible.
En août 2000, le Conseil de sécurité estimait que les
violations systématiques et généralisées du droit
international humanitaire et du droit relatif aux droits de l’homme,
y compris aux droits de l’enfant, dans les situations de conflit armé
« peuvent constituer une menace contre la paix et la sécurité
internationale[1] ».
En novembre 2001, le Conseil de Sécurité a prié le Secrétaire
général des Nations Unies de lui présenter une liste
des parties à des conflits qui recrutent ou utilisent des enfants dans
les situations dont le Conseil est saisi. Le Conseil de Sécurité
devra négocier avec les parties à des conflits armés
qui utilisent des enfants en vue d’élaborer des plans d’action
« clairs et assortis d’échéances » pour mettre
un terme à cette pratique[2].
Lors de son intervention devant le Conseil de Sécurité, le Représentant
spécial du Secrétaire général sur les enfants
et les conflits armés, rappelait que les parties aux conflits (RDC,
Liberia et Ouganda) continuent de violer, dans une impunité totale,
les droits des enfants[3].
Le Conseil de Sécurité dans sa résolution 1539 (2004)
recommande aux Etats de mettre fin à l’impunité et de
poursuivre les responsables de génocide, de crimes contre l’humanité,
de crimes de guerre perpétrés contre des enfants[4].
Nous n’avons pas le droit de voler aux enfants leur jeunesse…
J’attire l’attention de la communauté des artistes, des
écrivains, des ONG, de la presse sur le rôle qu’elle peut
jouer pour l’éradication de la violation des droits de l’enfance
africaine. Tout en prenant conscience des réalités actuelles
et du contexte chaotique africain, il est temps pour que la communauté
artistique, littéraire et les médias dénoncent le sort
réservé à la jeunesse africaine.
Nous n’avons pas le droit de voler aux enfants leur jeunesse faite de
rêves et d’ambitions. Par la culture et les arts, le monde culturel
africain a su inverser le cours de l’histoire coloniale de l’Afrique.
C’est par la vertu de la dénonciation et de la contestation que
s’opèrent les grands changements politico sociaux.
Le monde des arts et des lettres devrait œuvrer pour un traitement profond
du drame des enfants d’Afrique. La Société civile africaine
constituée par les organisations non gouvernementales, les instituts
de formation et de recherche, les syndicats, les écrivains, les artistes
et les médias pourrait jouer un rôle important, en contribuant
à la construction, à la consolidation des droits de l’enfant.
Elle peut être un vecteur essentiel dans le domaine de la promotion
des droits de l’enfant. À cet égard, une importance particulière
est à accorder à la défense et à la promotion
de la liberté d'expression ainsi qu'à l'indépendance
des médias, qui jouent un rôle de "surveillance" du
pouvoir exécutif en dénonçant les abus et un rôle
de renforcement de la société civile au travers d'une information
sinon objective, du moins pluraliste sur le drame que vit la jeunesse africaine.
Les ONG spécialisées sur l’enfance devraient être
davantage impliquées dans les procédures de suivi des normes
en vigueur sur la protection des enfants. Les initiatives, les suggestions
et les idées émanant du secteur associatif sont considérées
comme l’expression réelle des citoyens du continent. Elles pourront
favoriser une prise de conscience de la situation précaire des enfants.
La société civile peut jouer un rôle primordial avec le recours à de multiples actions de conscientisation notamment à l’éducation scolaire, civique et politique pour diffuser à grande échelle le droit des citoyens de l’enfant.
Responsabilité collective vis -à- vis des jeunes africains.
Il est indispensable que les écrivains et artistes s’engagent
pour que ce combat de l’enfance martyrisée ne soit plus qu’un
vieux rêve. Je vous invite maintenant à méditer sur notre
passivité coupable qui a souvent permis à l’arbitraire
de se manifester, en citant les propos d’un visionnaire et fils du continent:
« nous avons tous eu peur, à un moment ou à un autre,
nous avons appris à taire notre révolte intérieure, à
nous incliner devant l’injustice et l’arbitraire. Nous avons appris
à avaler des couleuvres, accepter l’inacceptable, et faire de
nécessité vertu.
Nous avons même pris l’habitude de quémander comme des
faveurs des droits qui comptaient parmi les plus naturels et les imprescriptibles.
Ainsi triomphent les dictatures, avec la complicité des victimes. Et
si la démocratie est un défi, c’est peut-être d’abord
pour cela : parce qu’elle suppose non seulement l’affrontement
de la machine répressive, la dénonciation sans complaisance
et la lutte pratique contre la barbarie triomphante, mais aussi, mais d’abord,
que nous fassions sur nous-mêmes le travail intérieur préalable
nécessaire pour nous libérer de la peur et devenir enfin ce
que nous n’avons peut-être jamais été : nous-mêmes[5]
».
Le sens de l’engagement contre l’arbitraire, pourrait-on dire, est dans la capacité de mobilisation et dans l’action, non dans la fuite en avant. Elle est dans la dénonciation et non dans le silence coupable ou complice. Or, de plus en plus l’humanité refuse de se pencher avec compassion sur la souffrance des enfants. Le monde d’aujourd’hui dispose de tous les moyens économiques, technologiques et financiers, et pourtant les conflits atroces hypothèquent dangereusement l’existence de millions de gamins et tuent un enfant toutes les 3 secondes.
Les défis restant à relever par les dirigeants africains et
la communauté internationale pour préparer le futur sont immenses.
Afin de ne pas se rendre coupable d’un manque de vision pour le continent
lui-même, c’est sans plus attendre qu’il faut prendre à
bras le corps cette responsabilité collective vis-à-vis du devenir
des jeunes africains.
[1] | Résolution du Conseil de Sécurité
des Nations Unies 1314 ( 2000), UN Doc.S/RES/1314 ( 2000), 11 août
2000, para.9. |
[2] | Résolution du Conseil de Sécurité
des Nations Unies 1460 ( 2003 ), UN Doc.S/RES/1460 ( 2003 ), 30 janvier
2003, para 4. |
[3] | Statement before the Security Council
by Olara A.OTUNNU Under-Secretary-General for Children and Armed Conflict,
New York, 20 january 2004. |
[4] | Resolution 1539 ( 2004 ) adopted by
the Security Council at its 4948 th meeting, on April 2004. |
[5] | M-Paulin.J.Hountondji, La Démocratie
aujourd’hui, Afrique 2000, 1 Avril 1990, p 62. |
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