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Du simple cadre de solidarité politique qu’elle était à ses débuts, l’Organisation de la conférence islamique (Oci) qui regroupe 57 Etats membres et quatre Observateurs, est devenue un partenaire incontournable dans la définition des politiques publiques internationales. En Suisse, le peuple est appelé le 29 novembre prochain à se prononcer sur une initiative dite ‘anti-minarets’, soutenue par les partis de l’extrême droite. Face à l’hostilité grandissante dont sont victimes les Musulmans en Occident, le Sénégalais Babacar Bâ, ambassadeur de l’organisation à Genève, est monté au créneau pour avertir le monde occidental contre la banalisation de l’islamophobie. Il s’exprime, par ailleurs, sur la possibilité d’une médiation de l’Oci dans le conflit Suisso-libyen qui remonte depuis l’arrestation dans un hôtel suisse de Hannibal Kadhafi, accusé de maltraitance sur ses employés. |
L’Oci fête cette année son 40e anniversaire. Pouvez-vous nous parler de ses activités et de ses défis pour les années à venir ?
« L’Oci fête effectivement en cette année 2009 ses 40 ans d’existence. Cela constitue un évènement majeur que nous avons célébré ici à Genève, lors d’une grande réception à laquelle ont pris part des officiels suisses, le corps diplomatique et les hauts responsables du système des Nations unies et les directeurs généraux des institutions internationales, basées à Genève. Du simple cadre de solidarité politique qu’elle était à ses débuts, l’Organisation de la conférence islamique, qui regroupe 57 Etats membres et quatre Observateurs est devenue aujourd’hui un important instrument de coopération touchant tous les secteurs de développement économique et social. Du commerce aux finances ; de la culture à la technologie ; de la santé à l’éducation, l’Oci et ses organes spécialisés œuvrent à couvrir tous les secteurs de préoccupation de nos Etats membres.
Il reste évident, qu’en raison de l’ampleur des défis à relever aussi bien au plan politique et diplomatique qu’au niveau économique que social, l’Organisation fait face à des problèmes de réadaptation de ses structures et méthodes d’action. C’est ce qui justifie le processus de reforme engagé depuis 2005 par le nouveau Secrétaire général, sur la base d’un plan d’action décennal adopté par le Sommet extraordinaire de Makkah Al Mukarrama. La défense de la cause palestinienne, la préservation de la ville Sainte d’Al Quds Alsharif, le suivi des situations de crise dans la Ummah islamique, la lutte contre la montée de l’islamophobie, l’extrémisme religieux et le terrorisme, tout cela constitue des défis majeurs pour l’Oci aux côtés des autres défis liés au contexte économique et écologique mondial.
Que comptez-vous faire face à l’hostilité de certains Suisses à certains symboles des musulmans comme l’élévation de minarets dans les mosquées, par exemple.
« Nous mettons en garde les dirigeants politiques européens sur les dangers de la montée de l’islamophobie, suscitée et instrumentalisée par des leaders politiques de l’extrême droite à des fins électorales. L’initiative visant à bannir l’édification de minarets en Suisse soumise par un parti radical suisse entre dans cette perspective. Voilà pourquoi, nous avons exprimé nos préoccupations aux autorités suisses sur les conséquences négatives que pourrait entraîner une telle mesure sur l’image de la Suisse. Un pays jusqu’ici apprécié pour son ouverture, sa diversité et sa tolérance. De plus, il serait incompréhensible qu’une telle mesure soit adoptée par le pays gardien des textes fondamentaux en matière de droits de l’Homme. Comme l’a souligné le Secrétaire général de l’Oci, nous restons confiants quant à la maturité et à la sagesse de l’électorat suisse, pour rejeter le 29 novembre prochain, l’initiative qui leur sera soumise au vote.
Nous sommes heureux de constater que beaucoup de leaders politiques et religieux de toute obédience ont marqué leur désapprobation vis-à-vis de cette initiative. Nous sommes en contact régulier avec les leaders religieux pour promouvoir le dialogue interreligieux et œuvrer à l’entente, la connaissance et le respect mutuel entre les différentes communautés.»
Des musulmans suisses engagés en politique ont organisé un débat sur la votation autour de la construction des minarets. Appuyez-vous cette initiative ?
« J’ai été invité à prendre part à la conférence, organisée le vendredi 6 novembre à l’université de Genève, par la Ligue musulmane pour la paix confessionnelle. Nous avons saisi l’occasion pour encourager les organisateurs à poursuivre leurs actions dans le cadre de la promotion du dialogue interreligieux. J’ai saisi l’occasion pour rappeler la position de l’Oci par rapport à l’initiative anti-minaret, position qui rejoint celle exprimée par le Conseil fédéral suisse et le Conseil d’Etat du Canton de Genève. Nous pensons que face à la montée de l’islamophobie, qui s’alimente de fausses perceptions et de mauvaises connaissances de l’Islam et de ses enseignements, il est important que la société civile, les Ong et les leaders religieux soient au front pour mieux éclairer l’opinion publique afin d’éviter qu’elle ne tombe dans le piège de ceux qui cherchent à semer le trouble et l’exclusion au sein des communautés.»
On sait que les relations entre la Suisse et la Libye sont difficiles, envisagez-vous une médiation ?
« En tant que organisation intergouvernementale œuvrant aux côtés des Nations unies pour la préservation de la paix et de la stabilité internationale, l’Oci peut offrir ses bons offices pour résoudre la crise politique qui oppose la Lybie et la Suisse. Mais comme je l’ai souligné à la télévision suisse, il faudrait pour cela que les négociations bilatérales actuelles soient bloquées et que la Lybie, Etat membre de l’Oci manifeste le désir de voir notre organisation s’impliquer dans la recherche d’une voie de sortie. Pour l’instant, il n’en est rien et nous osons espérer que les négociations bilatérales aboutiront. »
Le président Wade du Sénégal et président en exercice de l’Oci, pourrait-il dans ce sens intervenir ?
« En sa qualité de président en exercice de l’Oci, le président Wade est tout à fait indiqué pour mener une médiation ou désigner, en accord avec le Secrétaire général, un facilitateur. Pour autant, il faut le souligner, que les deux parties souhaitent une telle médiation. »
Propos recueillis par El Hadji Gorgui Wade NDOYE
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