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Moustapha Mbengue, jeune Rufisquois enseignant et chercheur à l’Université de Dakar a soutenu, avec brio le 20 octobre 2009, à Saint Denis Paris-8, sa thèse en Science de l’Information et de la Communication. Son travail portait sur la contribution de l’Internet à l’affirmation de la démocratie en Afrique. Sujet mal à propos ? Dans le résumé de la thèse, Docteur Mbengue annonce que « La démocratie, est bien souvent considérée comme une affaire de pouvoir, d’États et de peuples. » Or, il n’existe ni un pouvoir, ni un État, encore moins un peuple homogène en Afrique (même culture, même histoire) que l’on peut assimiler à une communauté, précise le chercheur. En effet, il existe en Afrique une multitude de peuples avec chacun ses langues, ses us et ses coutumes et bien souvent un mode de gouvernement et une perception démocratique différente de celle des autres. |
Cependant, il existe en Afrique des tentatives de regroupement politique ou de gouvernement à une échelle régionale. L’Union africaine et la CEDEAO en sont des exemples frappants. Ces organisations ne sont, me semble-t-il, que des formes d’intégration. Or, l’intégration n’est pas forcément synonyme de démocratie. Elles ne relèvent que d’une volonté politique de Chefs d’États qui visent à intégrer la théorie des grands ensembles (États-Unis, Communauté européenne) sans que cela soit l’émanation d’un commun désir populaire de vivre ensemble, exprimé par les populations africaines. Ces dernières ne sont pas consultées (par référendum comme ce fut le cas avec la communauté européenne) et elles ne définissent par conséquent pas la forme et encore moins les principes de fonctionnement de ces institutions.
Comment donc, parler de démocratie à une échelle régionale africaine alors que cet espace contrairement à un pays n’existe pas administrativement ? Comment vouloir, simplement a fortiori tenter d’articuler l’Internet à une démocratie dont les contours physiques et politiques de son terrain d’expression ne sont pas définis ? Ce pari semble difficile à tenir à priori, mais il vaut la peine d’être tenté. C'est à cela que s’est livrée notre étude.
La première partie de l’étude est une introduction générale sur la démocratie et les TIC en Afrique. Elle montre que malgré quelques spécificités, les principes universels de la démocratie se retrouvent dans ses déclinaisons africaines, même s’ils sont entachés de quelques imperfections. Aussi, l’expression de cette démocratie s’accompagne maintenant de l’usage des TIC, l’internet en particulier, à des fins d’administration et de gouvernance.
La seconde partie est une analyse approfondie du cas sénégalais. Elle présente le Sénégal dans son ensemble, son infrastructure et les différentes initiatives de mise à contribution des TIC au service de la démocratie dans ce pays. Aussi cette partie présente la méthodologie et les différents résultats des études qui ont permis de confirmer nos hypothèses de départ.
La troisième partie est une étude sur l’utilisation des TIC en général et de l’internet en particulier lors des élections présidentielles au Sénégal en 2007. Nous avons ainsi observé et analysé les usages démocratiques de l’internet au niveau de trois acteurs majeurs de la démocratie, à savoir :
- la société civile,
- les élus locaux,
- les populations sénégalaises, lors des élections présidentielles de l’année 2007.
La quatrième partie de l’étude est consacrée à une réflexion sur l’opinion publique et la citoyenneté à l’heure du numérique. Elle confirme l’idée d’une citoyenneté numérique qui s’exprime à travers les logiciels libres, l’existence de communautés virtuelles de même que les réseaux sociaux.
Nous sommes ainsi arrivé, à la lumière du diagnostique, à la conclusion que voici :
« L’optimisme ou le pessimisme qui entourent ou réfutent les vertus démocratiques de l’Internet relèvent du débat d’école et ils ne sont pas toujours fondés sur une analyse objective des implications sociales de la technologie » (Rodotà, 2009).
Il fallait plutôt partir d’exemples et de cas concrets pour pouvoir affirmer que malgré la fracture numérique et la relative jeunesse de la démocratie en Afrique, l’Internet contribue à une meilleure participation du continent noir au mouvement social mondial. Aussi, le cas sénégalais nous a permis de conforter, sans pour autant verser dans le déterminisme technologique, l’hypothèse que l’Internet participe, peut être encore timidement dans certains pays à l’affirmation de la démocratie en Afrique. Cette participation se mesure principalement à l’exercice du pouvoir, dans l’administration électronique, au dialogue entre les élus et leurs mandants, mais également dans la conquête du pouvoir par la mise à contribution des TIC à l’organisation de joutes électorales.
Cependant, l’internet est une technologie jeune en Afrique et la démocratie est également relativement récente dans ce continent et bien des pays n’y sont pas encore préparés. Par ailleurs, il existe une multitude de cultures, de langues et de civilisations en Afrique et le modèle démocratique applicable au Sénégal ne l’est pas forcément dans un autre pays africain. Il conviendrait donc de mener des études spécifiques sur les enjeux démocratiques de l’internet dans chaque pays d’Afrique en tenant compte de ses spécificités. Il sera ensuite possible de proposer une approche communicationnelle globale et des méthodes de consultation qui s’appuient sur les technologies de l’Internet, pour arriver à une réelle contribution de l’internet à l’instauration de la démocratie partout en Afrique.
Pour autant, la démocratie qu’elle soit représentative ou directe, repose avant tout sur la prise en compte des besoins exprimés par les citoyens d’une nation, de même que la l’obligation de rendre compte des décisions prises au nom de la communauté. C'est-à-dire la nécessité d’une communication transversale qui implique tous les acteurs de la démocratie, particulièrement l’État, les populations et la société civile. L’internet pourra, quel que soit le modèle démocratique choisi, contribuer à un meilleur dialogue entre les citoyens d’une nation et leurs représentants. Or, l’absence de dialogue nous semble être l’une des principales sources de conflits en Afrique.
Enfin, cette étude se termine par une dizaine de recommandations et des pistes de réflexion pour une meilleure appropriation démocratique de l’Internet au Sénégal en particulier, et en Afrique en général.
Notice Bibliographique :
MBENGUE, Moustapha, Contribution de l’Internet à l’affirmation de la démocratie en Afrique noire francophone : le cas du Sénégal, thèse de doctorat en Science de l’Information et de la Communication, Paris : Université Paris 8 Vincennes – Saint Denis, 2009, 333 p.
Mots clés : Afrique, Sénégal, démocratie, internet, fracture numérique, administration électronique, vote électronique, société civile, gouvernance, opinion publique, identité, citoyenneté.
UNIVERSITÉ PARIS 8 VINCENNES - SAINT DENIS
École doctorale Langage – Cognition – Interaction
Sous la Direction de Claude Baltz, Professeur des Universités
Les membres du jury :
Jacques Guyot, Professeur, Université Paris 8
Nicole d’Almeida, Professeur, CELSA, Université Paris 4
Michel Arnaud, Professeur, Université de Paris 10 Nanterre (rapporteur)
André Alain Kiyindou, Maître de Conférences HDR, IUT Robert Schuman,
Strasbourg (rapporteur)
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