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Par Dr Serge-Nicolas NZI, Chercheur en communication
Directeur du Centre Africain d’Etudes Stratégiques

VEZIA (SUISSE ) - Du Gaullisme, parlons-en ! - … Il y a des moments dans la vie où le silence des victimes encourage l’arrogance des vainqueurs. Ils se mettent alors à exécuter devant nous leur danse macabre, leur danse de morts. Conscients de l’impunité de leurs actes criminels, ils ont l’audace de vouloir faire avaler au monde entier, la pilule de l’amnésie collective. Nous vous interpellons, car l’Afrique dite francophone, a vécu une semaine d’anniversaire, de commémoration et d’hommage au général De Gaulle et nous avons vu des Africains aller goûter à la sauce, aromatisée et gluante du Gaullisme, bon marché dont les tenants ne se rappellent même plus le mal, qu’ils imposent ainsi aux peuples en souffrance qui gardent dans leur chair, le désespoir et la ruine que cette doctrine a infligé au corps économique, social, politique et institutionnel de nos pays africains de l’espace francophone.

Nous avons ainsi eu droit à des messes de requiem, à des expositions de photographies, à l’appel du 18 juin, et au discours de Brazzaville sur certaines radios africaines, bref le grand jeu pour un mort lointain. Alors que nos populations crèvent de faim et de soif pour ne pas parler de la pandémie du Sida.
Frappés par l’amnésie, la cécité politique et l’infertilité morale, certains gouvernants africains semblent aujourd’hui être plus préoccupés par ce qui vient de l’extérieur, l’anniversaire de la mort du général Charles De Gaulle, est un évènement pour eux. Au lieu de se préoccuper du bien - être de nos populations qui végètent aujourd’hui encore dans la crasse, la pauvreté et la maladie, dans des villages sans eau ni électricité.
L’Afrique dite francophone souffre de la nocivité du gaullisme et de ses séquelles, c’est pourquoi en ce qui nous concerne, nous refuserons toujours d’être les Africains de service, ceux qu’on utilise comme des paravents pour faire croire que tout va bien.
Ceux qui dans les temps obscurs de l’esclavage, dormaient dans la maison du maître, quand les nôtres passaient la nuit dans la grange avec le bétail, ceux qui dans la période douloureuse de l’apartheid, servaient d’indicateurs à la police du régime criminel blanc d’Afrique du Sud. Ceux-là même qu’on utilise aujourd’hui encore contre nous pour mieux nous endormir.
De Gaulle est mort le 9 novembre 1970 dans sa résidence de Colombey-les- deux-églises en haute Marne. Il laissait à la France cette doctrine politique qu’est le gaullisme, dont les gardiens du temple, nous disent sans sourciller que:

  • c’est une philosophie politique dont le principe repose sur la grandeur de la France, son existence en tant que nation, son rayonnement dans le monde ainsi que l’adaptation de ses institutions et de sa vie sociale aux exigences du monde moderne.
  • Le gaullisme a commencé pendant la guerre comme un mouvement de résistance patriotique. Il se caractérise par - l’unité, le rassemblement et la résistance contre l’occupation hitlérienne.
  • L’indépendance de la France, et le refus de sa « vassalisation » par des organismes supranationaux ( ONU, OTAN et de la superpuissance des USA). Cette indépendance est défendue dans les domaines politique, économique, culturel, diplomatique et militaire.
  • Sa méthode dit-on, repose sur le pragmatisme et le refus des carcans idéologiques en vue d’atteindre les objectifs fixés : l’indépendance de la France, son rayonnement dans le monde, l’unité intérieure de la France au service du projet patriotique de son leader relié directement au peuple français par le suffrage universel direct.
  • C’est aussi la fin de l’engagement colonial de la France à travers l’indépendance des pays d’Afrique noire et de l’Algérie.

C’est sur l’aspect concernant le rayonnement de la France et de la fin de son engagement colonial que nous voulons intervenir pour relever les ambiguïtés que l’Afrique a héritées du gaullisme et qui sont en partie responsables des malheurs de l’Afrique dite francophone.
Le sacrifice des indépendances africaines par le gaullisme
Il y a quatre raisons fondamentales qui expliquent la nocivité du gaullisme vis-à-vis des indépendances africaines :

  • la première, c’est le rang de la France dans les relations internationales et à l’ONU particulièrement avec un cortège de pays clients qui votent à sa suite.
  • La deuxième, c’est l’accès aux matières premières stratégiques ( pétrole, uranium) ou juteuses (cacao, café, bois précieux, etc. ) auquel il faut ajouter la domination économique et monétaire à travers la gestion du franc CFA relié au Franc français.
  • La troisième, c’est un financement d’une ampleur considérable de la vie politique française, à travers des prélèvements sur l’aide publique au développement, la vente des matières premières et l’attribution des grands marchés d’équipements de nos pays aux entreprises françaises quel que soit le montant de la facture.
  • La quatrième, c’est le rôle de la France comme sous-traitant des USA dans la guerre froide, pour maintenir l’Afrique francophone dans la mouvance anti-communiste contre l’URSS.

Donc pour ces quatre raisons De Gaulle met en place un système qui va nier les indépendances de nos pays africains. C’est cela le caractère nocif du gaullisme sur lequel nous reviendrons plus loin.
Retour à Brazzaville.
La conférence de Brazzaville convoquée dans la précipitation est ouverte par le chef de la France libre le 30 janvier 1944. Aussi bizarre que cela peut paraître, il n’y avait pas de représentant des différents pays colonisés. Curieuse conférence. Elle est sensée examiner l’avenir des relations entre la France et ses colonies avec les colons plus nombreux à la table de non négociation, devant quelques pauvres noirs de service.
Charles De Gaulle fut pour les français sans doute un homme de référence et les hommages qui pleuvent aujourd’hui encore sur sa mémoire nous font dire qu’ils sont plus attachés à ses idées. Examinons ici ce qu’il disait à Brazzaville, la capitale de l’AEF de l’époque dont le gouverneur Félix Eboué, était un noir, franc-maçon, originaire de la Guyane actuelle.
« Depuis un demi-siècle, à l’appel d’une vocation civilisatrice vieille de beaucoup de centaines d’années, sous l’impulsion des gouvernements de la République et sous la conduite des hommes tels que : Galliéni, Brazza, Dodds, Joffre, Binger, Marchand, Gentil, Foureau, Lamy, Borgni-Debordes, Archinard Lyautey, Gouraud, Mangin, Largeau.
Les français ont pénétré, pacifié, ouvert au monde, une grande partie de cette Afrique noire, que son étendue, les rigueurs du climat, la puissance des obstacles naturels, la misère et la diversité de ses populations avaient maintenue, depuis l’aurore de l’histoire, douloureuse et impénétrable ».
Bref, nous vous épargnons la suite de cette allocution qui parle d’établir de nouvelles bases des conditions de la mise en valeur de notre Afrique, du progrès humain de ses habitants et de l’exercice de la souveraineté française sur nos malheureux pays africains.
Douche froide dans une curieuse conférence
C’est un tournant de l’histoire coloniale française et pourtant la fin de l’œuvre coloniale proclamée par celui qui parle au nom de la France, écarte toute idée d’autonomie et d’indépendance des possessions dite françaises.
De Gaulle n’est pas le décolonisateur dont la France vante le mérite, c’est une immense supercherie des tenants du gaullisme sur laquelle nous nous réservons le droit de revenir, car en définitive, c’est bien nous les africains qui sommes aujourd’hui encore les victimes de ce poison nocif qu’est le gaullisme.
Le général De Gaulle souligne la nécessité d’amener les africains à participer à la gestion de leurs propres affaires, mais avec une restriction importante : « la fin de l’œuvre de civilisation accomplie par la France dans les colonies dit-il, écartent toute idée d’autonomie, toute idée d’évolution hors du bloc français de l’empire ; la constitution éventuelle - même lointaine - de self-governments dans les colonies est à écarter »
Nous connaissons la suite : l’union française est crée en 1946, après le retrait du général de Gaulle de la vie politique pour entamer à Colombey-les-deux-églises « une longue traversée du désert »
Le 13 mai 1958, il revient au pouvoir pour amorcer le processus éphémère de la soit disant communauté franco-africaine en clair un mariage du cheval et du cavalier.
Laissons ici le grand Sily guinéen Ahmed Sékou Touré exprimer ce que les Africains dans leur immense majorité pensent réellement de l’homme à la croix de Lorraine, de la France et de la communauté de souffrance qu’ils proposent aux peuples africains des colonies françaises.
Le gaullisme comme une immense duperie
Lundi 25 Août 1958, la rencontre du Sily avec la croix de Lorraine est une page de dignité dans l’histoire des peuples africains, peu importe ce que cela coûtera à Sékou Touré et à la Guinée, mais les blancs savent depuis ce jour là que tous les africains ne sont pas des laquais prêt à s’inviter à la soupe gluante et puante du gaullisme triomphant.
La réception de Conakry fut grandiose et inoubliable, De Gaulle lui même en témoigne et le souligne dans ses mémoires. Les historiens français ne nous contrediront pas sur ce point. Ce jour là De Gaulle habitué aux interlocuteurs africains de service, plus formalistes, n’a aucune idée du tempérament fougueux et de la phraséologie révolutionnaire et syndicaliste du jeune leader guinéen.
Après avoir salué l’homme du 18 juin, le patriote résistant, le héros de guerre, l’homme à la croix de Lorraine, l’éléphant orateur, le Sily guinéen entre dans le vif du sujet : « Notre option fondamentale qui a elle seule, conditionne les différents choix que nous allons effectuer, réside dans la décolonisation intégrale de l’Afrique, ses hommes, son économie, son organisation administrative, etc, en vue de bâtir une communauté franco-africaine solide dont la pérennité sera d’autant plus garantie qu’elle n’aura plus en son sein des phénomènes d’injustice, de discriminations ou tout autre cause de dépersonnalisation et d’indignité. » Et le Sily ajoute comme pour porter l’estocade : « Nous ne renonçons pas et nous ne renoncerons jamais à notre droit légitime et naturel à l’indépendance. Car nous entendons exercer pleinement ce droit, le projet de constitution ne doit pas s’enfermer dans la logique du régime colonial ». Puis il ajoute comme pour enfoncer l’estocade : « Nous sommes africains et nos territoires ne sauraient être une partie de la France. La qualité ou plutôt la nouvelle nature des rapports entre la France et ses anciennes colonies devra être déterminer sans duperie. En disant Non de manière catégorique à tout aménagement du régime colonial et à tout esprit paternaliste, nous entendons ainsi sauver dans le temps et l’espace les engagements qui seront conclus par la nouvelle communauté franco-africaine.
Notre cœur, notre raison, en plus de nos intérêts les plus évidents , nous font choisir sans hésitation, l’indépendance et la liberté dans cette union, plutôt que de nous définir sans la France et contre la France.
Il n’y a pas de dignité sans liberté, car tout assujettissement, toute contrainte imposée et subie dégradent celui sur qui elle pèse, et lui retire une part de sa qualité d’homme et en fait arbitrairement un être inférieur. Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage »
Ce discours est d’actualité et il n’y a aucun africain aujourd’hui digne de sa race qui ne se reconnaît pas dans l’intervention sans concession du grand Sily guinéen. Il ne s’agit pas ici d’être pour la France ou contre la France et les Gaullistes. Il s’agit d’établir de nouveaux rapports qui instaurent la confiance et l’amitié vraie dans les relations franco-africaines.
Observez aujourd’hui la pénétration des Chinois en Afrique et vous comprendrez que c’est sur la base de l’amitié, du travail bien fait dans la confiance sans volonté de dominer l’autre qui fait qu’aujourd’hui les Africains se tournent vers la Chine pour construire de petites infrastructures que les Français auraient facturé au triple du coût normal.
La duperie, oui la duperie et le mensonge ont vicié nos relations avec la France officielle, il est temps de décoloniser les relations Franco-africaine.
Pour que nous retrouvons ensemble ce que le Sily guinéen proposait à De Gaulle à Conakry, il y a 48 ans. Un vrais mariage sur la base de la confiance et de l’estime entre les deux parties.
Et la France officielle doit être heureuse que ce soit un chercheur africain qui le dit clairement avec son indépendance d’esprit. Car demain. Ce sera des hommes et des femmes, avec machette et fusil en main dans la rue qui l’exigeront de Lomé à Dakar, de Douala à Brazzaville, de N’djamena à Abidjan, si ce n’est déjà fait pour cette dernière ville.
Et ce jour là la France officielle et les gaullistes du dimanche se rendront compte tardivement de la rupture nécessaire qu’ils ont refusé d’opérer avec le paternalisme de type gaullien dans les relations franco-africaines.
Aujourd’hui, il y a en Afrique une autre race de chefs d’états. Ils ne sont pas nombreux, mais c’est une question de temps. Ils ne ressemblent pas et n’ont rien à avoir avec les Houphouet-Boigny, Mobutu, Bokassa, Habyarimana, Léon Mba, Eyadéma, Yaméogo, Hamani Diori, Tombalbaye, Amadou Ahidjo, Bongo, Biya, Sassou Nguesso, Compaoré et consorts.
Ils ont pour nom : Ellen Johnson-Sirleaf, Tabo Mbeki, Yahi Boni, Gbabo Laurent, John Agyekum KUFUOR. Et nous pouvons vous assurer qu’ils pensent tous la même chose que le défunt Sily guinéen. Ils souhaitent tous une amitié sincère avec la France, loin des assujettissements qui nous ont conduits dans les impasses du temps présent.
Revenons à Conakry pour écouter Charles De Gaulle
Face a une exigence de bon sens et une main tendue par les nationalistes guinéens pour construire une communauté fraternelle et humaine. Calmement, De Gaulle se lève d’un pas lourd, le regard lointain et méprisant, cette expression se retrouve toujours chez les blancs quand ils ont affaire aux africains.
Fier de lui même et de sa patrie il va répondre au grand Sily. Le commandant de la révolution guinéenne qui affronte ce jour là comme disent nos parents malinké le deuxième des trois jours inscrits dans son destin. (le jour de la naissance, le jour du courage et celui de la mort)
La réponse du général est claire et brutale : « on a parlé d’indépendance ; ( comme s’il ne connaissait pas celui qui a parlé d’indépendance, c’est une manière hautaine et ironique de ridiculiser celui qu’on a en face de soit) je dis ici plutôt qu’ailleurs que l’indépendance est à la disposition de la Guinée. Elle peut la prendre le 28 septembre en disant « Non » à la proposition qui lui est faite et, dans ce cas je garantis que la métropole n’y fera pas d’obstacle.
Elle en tirera bien sûr des conséquences mais d’obstacle elle n’en fera pas et votre territoire pourra comme il le voudra et dans les conditions qu’il voudra suivre la route qu’il voudra ». Puis De Gaulle poursuit sans état d’âme : « La communauté, si nous la faisons ensemble, ce sera un acte de foi dans une destinée commune et humaine et ce sera aussi, je crois bien, la manière, la seule manière d’établir une collaboration pratique pour bien des hommes dont nous avons la responsabilité. Je crois que la Guinée dira Oui à la France et alors je crois que la route nous sera ouverte où nous pourrons marcher en commun ».
Le général De Gaulle ce jour là a manqué de psychologie et de tact vis-à-vis des Africains.
En effet les nationalistes guinéens n’attendaient qu’une simple promesse d’aménagement de ce qui était proposé pour voter Oui, au lieu de cela, le chef de la France libre brandit des menaces à peine voilées.
Le temps des ruptures
Nous rappelons ici que les Soussou, les Bambara et les malinké sont des vieux peuples d’Afrique de l’ouest, des peuples très fiers qui en Afrique connaissaient la notion d’Etat quand l’Europe d’aujourd’hui était encore en plein moyen âge. Aller chez eux et s’adresser à eux en terme de menace, sur des sujets concernant l’indépendance et la liberté, même l’homme le plus fou de la terre ne fera pas cette grave erreur historique.
L’histoire des Etats qui se sont constitués au cœur du continent africain depuis le XIVème siècle et le XVIème siècle et qui par leur dimension, le niveau de leur organisation et l’ampleur de leur rayonnement, avaient dépassé le stade des institutions et des structures des sociétés médiévales européennes, étaient aussi l’œuvre des Bambara, des peuls et des malinké dont une bonne partie vivent dans la guinée actuelle.
Arrogant, hautain, menaçant un des peuples les plus ancien du continent africain et surtout en homme suffisant et rempli de ses certitudes d’homme blanc, De Gaulle ce jour là ne cherchait pas un dialogue constructif, il voulait que le peuple guinéen dans son entier soit à genoux devant lui pour son triomphe personnel et celui du Gaullisme gluant et puant d’arrogance.
Au lieu d’un vrai mariage entre égaux, De Gaulle parle de sécession pénale : « nous voulons la liberté, on nous promet des sanctions », dira plus tard Sékou Touré.
Ce fut ces considérations qui motivèrent le « Non » de la Guinée au référendum du 28 septembre 1958. Rappelons pour ceux qui ne le savent pas que la question posée par le référendum était : « acceptez-vous que votre pays forme avec la France une communauté de peuples dont le fonctionnement est défini par le texte soumis à votre appréciation ? » C’est dans ces conditions exposées plus haut que la Guinée vota pour un « NON » retentissant, non à De Gaule, non au paternalisme et non au néocolonialisme français. Les Guinéens aujourd’hui encore estiment que les humiliations, et les luttent menées par les résistants africains, n’ont pas été faites pour que le jour venu, ils refusent l’indépendance et la liberté à travers un simple vote.
C’est également le même mépris et la même arrogance qu’on retrouve chez les néo-gaullistes qui à travers les accords de Marcoussis ont obligé un chef d’état africain, Laurent Gbagbo, le président actuel de la Côte d’Ivoire à accepter des rebelles dans son gouvernement pour voir la France mettre toute sa diplomatie dans le concert international au service d’une Rébellion armée dans le seul but d’affaiblir un chef d’état qui refuse la vassalisation de son pays et qui exige sans complaisance, la refondation des accords de coopération franco-ivoirienne.
De l’obliger à accepter les exigences d’une rébellion crapuleuse et favoriser une révision des listes électorales permettant un peuplement artificiel de la zone occupée par la rébellion en vue de l’organisation des élections permettant à un gouvernement fantoche d’arriver au pouvoir.
Et cela pour les seuls intérêts de la France dans un pays qui n’aspire qu’à être libre dans la diversification de ses choix, de ses amitiés et de sa coopération avec le reste du monde. C’est ce qui explique la difficulté présente d’un règlement durable de la crise ivoirienne.
La France néo-gaullienne n’a pas tiré les leçons du Fantochisme et de ses conséquences à long terme dans le Moyen orient d’aujourd’hui. Nous soumettons à la méditation des gaullistes et des experts du quai d’Orsay qui n’ont pas prévu une seule seconde l’opposition d’une société civile ivoirienne aux accords de Marcoussis, de réfléchir à l’affaire Mossadegh.
Les leçons de l’affaire Mossadegh
Permettez - nous de rappeler aux néo-gaullistes l’histoire du nationaliste iranien Mohammed Mossadegh. Sachez que pour la première fois, le 19 mars 2000, la secrétaire d’Etat américaine Madeleine Albright, reconnaissait publiquement l’implication des USA dans le coup d’Etat qui renversa le premier ministre iranien le Dr Mohammad Mossadegh le 19 Août 1953.
Les circonstances de cette implication sont aujourd’hui bien connues, car le New York Times a divulgué en avril 2000 un rapport secret de la CIA sur le rôle joué par la CIA et les services secrets britanniques dans un événement qui bouleversa durablement les rapports de forces au Proche- Orient.
Mossadegh, était un juriste qui avait étudié les sciences politiques en France et le droit à Neuchâtel en Suisse. C’était un nationaliste intransigeant sur les intérêts de son pays vis-à-vis de l’étranger et surtout un anticolonialiste fondamentalement opposé à toutes les formes de subordinations de son pays. C’est lui qui, en 1944 rédigea la loi iranienne interdisant à quiconque de négocier un accord de prospection, de concession et d’exploration pétrolière avec des compagnies étrangères sans l’aval du parlement élu par le peuple iranien. Devenu premier ministre de l’Iran le 29 avril 1951, il nationalise l’Anglo-Iranian Oil Company.
Contrairement à ce qu’affirme à l’époque la propagande britannique, le Dr Mossadegegh est résolument démocrate. Nationaliste et non-communiste. Il présente une offre d’indemnisation aux britanniques, qui exigent une compensation pour la totalité des revenus dont-ils seront privés dans les 40 années suivantes. C’est cette arrogance qui radicalisa la position des nationalistes iraniens et celle du Dr Mossadegh.
Les anglais s’adressent à la cour internationale de justice de la Haye.
Le Dr Mossadegh, qui conteste cette juridiction s’y rend et plaide lui-même le 9 juin 1952 la cause de son pays . « L’Anglo-Iranian oil, était un Etat dans l’Etat. Tout était aux mains des anglais, l’Iran n’avait aucun droit de regard sur sa propre production et les prix, les recettes sont dissimulées à travers les malversations d’une double comptabilité démontrée, audit à l’appui. Cette affaire relève d’une juridiction iranienne ». Il obtiendra satisfaction lorsque, le 22 juillet 1952, la cour par 9 voix contre 5 se déclare incompétente.
La CIA et le M16 britannique mettent alors en place « l’opération Ajax », dont le but est de déstabiliser l’Iran et de renverser le Dr Mossadegh à travers un coup d’Etat avec le soutient d’un empereur d’opérette le Shah d’Iran Mohammad Reza Palavi.
Les affrontement entre pro et anti-monarchistes dégénèrent. Le 19 août 1953, 6000 figurants rémunérés par la CIA, marchent sur le palais impérial pour réclamer la démission du Dr Mossadegh, qui est arrêté et jeté en prison. Le Shah est ramené d’exil par les USA qui lui impose comme premier ministre le général de pacotille Fazlollah Zahédi. Ce dernier met en place une terrible répression contre les milieux nationalistes iraniens et une police politique , la Savak, sur le modèle de la Gestapo et laisse, les USA, les Britanniques, les français et les Hollandais, contrôler le pétrole iranien.
Le 6 mars 1967, trois malheureuses lignes annonceront dans la presse iranienne le décès du Dr Mossadegh. Considéré comme un martyr par son peuple, des milliers d’Iraniens se rendent chaque année sur sa tombe à Ahmad-Abad pour rendre hommage à sa mémoire.
Le Shah considéré comme un traître par son peuple fut renversé en 1979 par une révolution islamique. Il est mort en exil et fut enterré au Caire en Egypte. Son nom est aujourd’hui associé au fantochisme, à la traîtrise et à l’irresponsabilité. Mieux encore, le nom de REZA PALAVI, est porté aujourd’hui par des animaux comme les chiens dans les rues de Téhéran. Cela doit donner à réfléchir à tous ceux qui en Afrique, complotent avec l’étranger contre les intérêts de leur propre pays.
L’éviction du Dr Mossadegh consacre l’échec de la première tentative d’un pays du tiers monde d’acquérir la maîtrise de ses richesses naturelles. Cet événement a nourri la frustration et de profonds ressentiments chez les iraniens d’aujourd’hui qui considèrent les USA et leurs alliés arabes et occidentaux comme des êtres malfaisants avec lesquels aucun dialogue n’est possible.
Aujourd’hui, les Mossadegh se multiplient dans le tiers monde, comme Nasser hier en Egypte, ils ont pour noms : Evo Morales en Bolivie, Lula au Brésil, Hugo Chavez au vénézuéla, Laurent Gbagbo en Côte d’ivoire, Thabo Mbeki en Afrique du Sud, Abd el-Aziz Boutéflika en Algérie etc. La paix mondiale dépend aujourd’hui de la justice et du respect des autres dans les relations entre nations.
L’arrogance des néo-gaullistes qui ont imposé des rebelles aux institutions de la Côte d’Ivoire et le ridicule comportement de la France à l’ONU visant à suspendre la constitution ivoirienne pour faire plaisir à la rébellion, nourrit déjà le dégoût et le ressentiment des ivoiriens contre la France néo-gaulliste, chiraquienne et sa coalition politico-rebelle, depuis l’échec du coup d’Etat du 19 septembre 2002, qui marque le début de la crise franco-ivoirienne.
De Gaulle : Décolonisateur ou pas ?
Pour nous les Africains, le seul devoir moral que nous avons aujourd’hui vis à vis du gaullisme, c’est de contribuer à détruire le mythe de cette fausse croyance de légitimation du général De Gaulle comme décolonisateur, ami de l’Afrique et des africains. Nous allons démontrer ici le contraire pour permettre à notre jeunesse de regarder le gaullisme avec d’autres yeux .
Les petits bonimenteurs du messianisme et de la mystification gaullienne, veulent nous faire croire que dans le cadre de la décolonisation, De Gaulle avait vite compris les africains pour leur redonner la fierté et la liberté. En ce sens De Gaulle apparaît comme un messie attendu qui aurait fait en sorte que l’Africain soit soulagé de tous ses malheurs.
À en croire les exégètes du gaullisme, tout ce passe comme si l’autonomie interne que De Gaulle propose quand il revient au pouvoir en 1958 est le paradis pour les africains. C’est de la foutaise. Observez les colonies anglaises d’Afrique de la même période et vous comprendrez, Mesdames et Messieurs le ridicule des encenseurs, des troubadours et autres laudateurs mesquins du gaullisme.
La vérité est que le mot indépendance n’était pas prononcé à Brazzaville ainsi qu’à Conakry, c’est par la menace qu’il répond aux nationalistes guinéens. En terme plus précis De Gaulle ne constitue pas un magicien de la décolonisation et les rapports qu’il entretient avec la décolonisation sont des rapports de mépris qui doivent figurer en bonne place dans le livre noir du gaullisme.
Le général De Gaulle n’a pas condamné les massacres de Thiaroye près de Dakar au Sénégal, le 1er décembre 1944 au cours desquels des anciens combattants d’Afrique noire qui revendiquaient leurs salaires et les indemnités de démobilisation, furent massacrés par l’armée française en terre africaine.
Ce fut un carnage, une boucherie digne de la France gaullienne, bref un immense bain de sang, les braves militaires français, dont le pays était hier encore occupé par l’Allemagne, s’en sont donnés à cœur joie ce jour là sur des soldats africains sans armes et cet fut une tragédie inexcusable dans le manteau puant de lâcheté qui recouvre la France coloniale et gaullienne : 35 morts, 35 blessés graves, 850 blessés légers, 34 inculpations et 34 condamnations à des peines de 1 à 10 ans de prison ferme pour insubordination, refus d’autorité et mutinerie. A cela s’ajoutent des amendes de 10 000f. Mieux encore, les 34 inculpés furent exhibés en petite tenue dans les rues de Dakar sous forte escorte militaire afin d’intimider la population. Nous parlons ici de faits réels et non d’un roman de science fiction.
Nous rapportons ici des faits, vérifiables, nous demandons qu’un seul français nous porte la contradiction sur les faits que nous évoquons dans ces lignes et nous nous ferons le plaisir de brandir l’extraordinaire plaidoirie de Maître Lamine Gueye, qui fut l’avocat des soldats africains de Thiaroye , devant le tribunal de Dakar, qui est considérée aujourd’hui, comme un document d’anthologie dans l’histoire du barreau africain. Il plaida la relaxe pure et simple de ses clients.
Ce document se trouve dans les archives nationales du Sénégal et est facilement accessible. Malgré l’évidence des faits la justice française, cette justice teintée de racisme et de lâcheté condamna sévèrement les anciens combattants africains, curieuse justice, celle qui condamne les victimes. La France a manqué à son devoir de dignité ce jour là. C’est pourquoi elle se couvre aujourd’hui encore du manteau puant et gluant de son éternelle hypocrisie.
Alors quand la France, les gaullistes et les Français se gargarisent des mots bon marché de liberté, de fraternité et d’égalité ainsi que de patrie des droits de l’homme, nous devons les prier de se regarder bien en face et d’avoir un minimum de retenue pour nos morts, c’est à dire ceux qui ont été des victimes de la méchanceté criminelle, d’un pays sans honneur qui s’appelle la France dont Charles De Gaulle en était le Chef.
La tragédie de Thiaroye fut un immense choc pour les Africains. Elle creusa un grand fossé entre les peuples africains et le gouvernement provisoire de la République français que dirigeait le général De Gaulle. Car De Gaulle n’avait pas condamné les massacres de Thiaroye. Mieux encore en tant que chef du gouvernement Provisoire de l’après guerre, il n’avait même pas daigné amnistier, les soldats africains qui avaient soutenu la France dans sa guerre contre l’Allemagne.
Le cynisme de son comportement devant une telle tragédie, renforça le camp des sceptiques qui doutaient de la sincérité des promesses hautaines faites à la conférence de Brazzaville en Janvier-février 1944 par le même général De Gaulle sous la pression des événements.
La tragédie de Thiaroye fut une grande désillusion pour les peuples africains, une blessure au cœur de tous les anciens combattants africains qui reprochèrent à la France ses doubles langages, son cynisme et son ingratitude.
La tuerie de Thiaroye a soulevé une vague d’indignation dans toute l’Afrique. Ce fut l’événement de référence qui a déclenché brutalement la prise de conscience des sujets coloniaux et qui a donné le point de départ à la lutte d’émancipation africaine.
Les massacres à la chaîne de la France gaullienne
En définitive les Africains d’aujourd’hui n’ont aucune considération pour la France et son armée, qui ont érigé le massacre des populations civiles comme moyen de perpétuer l’honneur perdu de la France à Thiaroye.
Le 8 mai 1945 répression sanglante à Sétif et Guelma en Algérie 20 000 morts, même l’aviation française fut réquisitionnée pour bombarder les zones insurgées.
Le 29 mars 1947, une insurrection éclate à Madagascar, des renforts sont rapidement acheminés et ce fut le carnage : des milliers de civils sont abattus et massacrés à la baïonnette, des villages rasés : 100 000 morts : la pacification de Madagascar est le grand oublié des massacres coloniaux et De Gaulle bien sûr n’a pas condamné ce massacre indigne de son pays.
Le 17 octobre 1961, la France du général De Gaulle ordonne la répression criminelle d’une manifestation sur l’initiative de la fédération de France du FLN dans les rue de Paris et en banlieue. Cette manifestation visait à dénoncer le couvre-feu raciste imposé au « français musulmans d’Algérie » la police parisienne était commandée par le préfet Maurice Papon. Les manifestants furent mitraillés et massacrés : 900 morts en plein Paris. Certains furent jetés dans la Seine après avoir été bastonné, ceux qui ne purent s’échapper furent raflés pour être envoyé dans des centres de rétention où ils furent torturés, certains furent même pendus à des arbres dans les bois.
Le savoir-faire de Maurice Papon sous l’administration du Général De Gaulle, montre une fois de plus la collusion étroite entre les méthodes fascistes et coloniales. La France, fidèle aux syndromes de Thiaroye a occulté jusqu’à ce jour cette partie de sa propre histoire.
Massacre en pays bamiléké au Cameroun. Entre 1960 et 1970, les forces camerounaises sous la direction de l’armée française commandée par le général Max Briand rasent le pays Bamiléké : 156 villages sont incendiés, 40 000 personnes sont massacrées.
Le ministre des armées du général De Gaulle, Mr. Pierre Guillauma, a évoqué cette tragédie en des termes plutôt élogieux dans un livre de François Xavier Verschave : voici ce que déclare Mr. Guillauma : « Foccart a joué un rôle déterminant dans cette affaire. Il a maté la révolte des Bamiléké avec Ahidjo et les services spéciaux. C’est la première fois qu’une révolte de cette ampleur a été écrasée convenablement. » C’est le ministre des armées d’une des grandes démocraties du monde occidental qui parle. La postérité appréciera. Sincèrement, y a t-il des preuves plus convaincantes que celles, aussi claires, qui sortent de la bouche d’une personnalité de ce rang ? Jamais de mémoire d’homme, on a vu un pays qui accepte de façon aussi pertinente et triomphaliste la responsabilité d’un désastre aussi important contre les populations civiles d’un autre pays.
Le colonialisme français n’est-il pas coupable de crime contre l’humanité, de génocide, de racisme, de massacres, de négation des autres cultures et de domination des autres peuples ? Voilà des questions importantes auxquelles les gaullistes et les néo-gaullistes doivent répondre avec sincérité pour que tout le monde soient à l’aise. Cela donnera de la modestie et de l’humilité à la voix de la France dans les relations internationales, au lieu d’étaler leur médiocrité, leur suffisance et surtout leur arrogance de matamore chaque fois qu’ils sont devant les africains.
Ils ont la mémoire courte, il faut leur rappeler que quand leur armée s’était liquéfiée devant la puissance de feu et les frappes des troupes de la Weimar, c’est vers nous, qu’ils ont trouvé les premiers soutiens. Nos villages de la savane, de la jungle tropicale et du désert sahélien, très loin du front, ont donné à la France leurs hommes les plus valeureux alors que le gouvernement français de Vichy prônait la collaboration avec les nazis.
Il est possible que les français, les gaullistes et les néo-gaullistes du dimanche ont honte de cette partie de leur propre histoire, mais c’est un problème qu’ils peuvent aujourd’hui régler en adoptant une attitude morale vis à vis de l’Afrique et des peuples africains et non pas en s’illustrant dans l’étalage d’une l’arrogance contre productive qui n’impressionne plus personne. Car en définitif, observez bien les Britanniques, ils n’ont pas envoyé en masse des africains se battre pour eux, ils ont préféré eux-mêmes se mettre en première ligne pour affronter les canons et les balles de l’ennemi allemand. On appelle cela, assumer sont destin.
Pour nous les africains, nous ne remettons pas en cause la modification du statuts des colonies par De Gaulle nous lui reconnaissons ce mérite et refusons de nous abîmer dans la mare boueuse de la malhonnêteté intellectuelle et perdre de vue les changements survenus en Afrique depuis 1960, car les indépendances même octroyées existent belle et bien.
Pourquoi les ivoiriens sont descendus en masse dans les rues pour sauver le régime de Laurent Gbagbo contre les chars de l’armée française ? C’est tout simplement au nom de l’idée d’indépendance de la Côte d’Ivoire. L’idée que ce pays existe et que ce n’est pas à la France de décider de qui doit diriger la Côte d’Ivoire. Comme disent les patriotes d’Abidjanais : « Nous préférons un mauvais gouvernement choisi par nous, qu’un bon gouvernement imposé par la France ».
Nous ne jetons pas la pierre à De Gaulle loin de nous cette idée, mais nous laissons le soin aux naïfs de croire que le Gaullisme est accoucheur de la décolonisation, il y aura toujours des petits français et des africains de service et des pantins pour le croire mais pas nous et les faits exposés plus haut nous renforcent dans cette position. En proposant la communauté et plus tard la coopération aux pays d’Afrique noire, c’est pour faire de nos pays des instruments d’une politique internationale au service de la gloire de son pays la France.
À écouter les gaullistes, c’est comme si les peuples africains étaient restés inactifs, impressionnés et sans réactions devant les manigances du colonialisme français. Comme si la mythologie gaullienne et l’histoire du gaullisme n’étaient pas redevables de l’espace et du sang des africains. Les français, ne doivent donc plus nous parler de décolonisation, en racontant la réalité de leur histoire d’amour avec De Gaulle. Nous ne nous sentons plus concerné par ce débat.
Chez De Gaulle, l’intérêt de son pays était plus important que la survie de notre continent. Il n’était donc pas un décolonisateur, c’était un colonisateur, qui avait mieux perçu dans quelle direction soufflait le vent de l’histoire.
Il faut que cela change pour notre avenir commun
Permettez - nous de rendre hommage à nos paysans du milieu rural africain. Nos origines paysannes nous autorisent à vous dire ici que nos parents ont donné la preuve de leur foi dans la construction nationale en Afrique. Par l’émulation dans un labeur enthousiaste. Ils ont produit du café, du cacao, du coton, de l’hévéa, des ananas, du riz, du mil, du sorgho, de l’arachide etc.. Pendant longtemps rien n’a pu décourager cette ardeur dans le travail au service de la patrie, rien, ni les calamités naturelles, ni les carences des gouvernements médiocres et corrompus issus de la décolonisation, plus préoccupés par leur image à l’étranger que d’œuvrer de manière conséquente pour le progrès économique et social de nos masses laborieuses.
Mais à présent, la coupe est pleine, c’en est trop, l’enthousiasme des ouvriers, des paysans des cadres s’émousse un peu partout en Afrique à un rythme inquiétant, cédant la place à la rancœur, au découragement. Le peuple se sent trahi, frustré des droits pour lesquels il s’est héroïquement battu, spolié dans ses richesses et bafoué dans sa dignité.
Voilà pourquoi de Cotonou à Dakar, d’Abidjan à Lomé, de Ouagadougou à Bamako, de Libreville à Yaoundé, de Niamey à N’djamena et de Brazzaville à Nouakchott, le peuple veut que cela change.
Nous voulons pour nos peuples africains, une politique intérieure de démocratie et de progrès. Une politique extérieure d’indépendance et de dignité nationale.
Nous voulons une politique de coopération interafricaine qui prenne le pas sur la coopération franco-africaine, une politique qui répudie donc la francophonie, ses mythes et ses projets.
Nous voulons une politique de coopération internationale rompant avec les alliances impérialistes et rejetant toute subordination de nos pays au mercantilisme néo-colonial français, avec ses barbouzes, ses réseaux occultes, ses mercenaires, ses combines et autres instruments d’intimidations et de morts.
Il est vrai que les monarques n’entendent pas la voix des peuples quand ils sont blottis dans leurs tours d’ivoire, jusqu’au jour où il devient trop tard. Nous craignons aussi que ce jour-là, il ne soit trop tard pour la France qui se fait aujourd’hui protectrice des régimes impopulaires, pour renouer un dialogue constructif avec les patriotes africains, pour sauver l’amitié de son peuple avec les africains. C’est justement parce que tel n’est pas notre souhait que nous tirons la sonnette d’alarme pendant qu’il est encore temps.
La France et sa francophonie
Concernant la francophonie, la France avance de façon subtile en croyant que les africains ne perçoivent pas la nocivité de sa stratégie à moyen et à long terme. Dans cette affaire la France sera le deuxième Gahou, c’est-à-dire la victime de sa propre naïveté.
Nous continuons de penser que la francophonie n’est rien d’autre que l’adaptation et la perpétuation de la « communauté impériale ». C’est au zèle et à l’imagination de ses agents locaux que l’impérialisme français doit cette trouvaille de la francophonie.
Qu’est-ce, au fond que la francophonie ? Présentée comme un cadre de coopération culturelle, elle n’est rien d’autre, en vérité qu’un substitut de la communauté éclatée,et de la communauté sous sa forme impériale. Elle l’est par sa doctrine et sa stratégie.
Une doctrine de coopération qui se fonde sur l’appartenance à une même communauté de langue et de culture, qui ne sont autres que la langue et la culture du conquérant. De ce point de vue la francophonie apparaît clairement comme une doctrine d’impérialisme culturel. C’est là l’impérialisme le plus redoutable, celui qui sans coup férir ouvre la voie aux autres formes de dominations, économiques et politiques. C’est l’impérialisme le plus redoutable. Celui qui assure les meilleures chances de pérennité par des aliénations et des destructions anthropologiques.
Dans ce cas, quel avenir peut-on espérer pour les langues nationales, pour les cultures nationales sous le régime d’une telle doctrine ? Ouvrez les yeux et observez Mesdames et Messieurs, les ministères de la francophonie qui ont poussé comme des champignons dans nos gouvernements d’Afrique, pour comprendre notre rage vis-à-vis de cette doctrine néfaste.
Nous le disons clairement et sans faux-fuyant, que par sa stratégie de reconquête, la francophonie est également une grave menace contre l’unité à la fois politique, économique et culturel de notre continent. Sa démarche avouée ou non, tend à contrecarrer le processus de formation d’espaces de solidarité décolonisés, géographiquement et historiquement plus homogènes.
Ce n’est pas tout car par sa nocivité, la francophonie, dispose aussi d’un organe qui, bien qu’informel , n’en constitue pas moins un cadre de concertation néo-coloniale. Nous voulons parler de la « conférence franco-africaine » qui, par sa composition, par les sujets qu’elle aborde, par les décisions qu’elle prend, par le rôle prépondérant qu’y joue la France, est une conférence impériale et néo-coloniale.
En tant que stratégie de reconstruction d’un espace de domination néo-coloniale, la francophonie est la négation de toute entreprise de création de solidarité horizontale ou même verticale géopolitiquement cohérent. Observez les pays africains francophone et vous verrez qu’en matière de coopération, le volume des échanges est toujours moins avec leurs voisins anglophones.
Ouvrez les yeux et vous observerez comme nous que tous les pays africains francophones se sont alignés politiquement et diplomatiquement sur la position de la France, favorable à la rébellion dans le cadre de la crise ivoirienne. Les pays qui ont soutenus le président Gbagbo sont l’Angola, la Ghana, la Tanzanie, l’Afrique du sud et la Guinée.
La France et les dirigeants politiques français doivent se rappeler aujourd’hui, que leur pays est une ancienne puissance coloniale, un pays qui occupe dans le présent une position moyenne dans les affaires internationales.
Sa langue est battue en brèche par l’anglais, la langue des USA la seule puissance du monde unipolaire dans lequel nous vivons. Le soutien des africains sera donc nécessaire à la France dans le concert des nations, c’est dans cette voie que l’humilité comme sous-bassement d’une coopération sans duperie, juste et humaine sera d’une grande utilité pour reconstruire notre avenir commun. Perdre de vue cette réalité, c’est tout simplement, parier sur le plus lamentable des fiascos. Car la démographie est une science et elle nous dit que dans 20 ans plus de la moitié des locuteurs de la langue française seront africains.
L’avenir du français en tant qu’instrument de communication entre les nations, se joue donc en Afrique. Nous prions les francophiles, les gaullistes, les néo-gaullistes et tous ceux qui ont foi en cette langue, de se mettre au travail dès aujourd’hui pour qu’elle ne se présente pas à nous comme une langue de domination. Car la nouvelle génération d’africains observera à la loupe le comportement du principal locuteur avant de s’engager dans la défense de la langue française, qui est pour nous une langue d’emprunt et non une langue maternelle.
Conclusion générale
Nous avons examiné le contenu des accords de 1961, dits de coopération qui lient la France aux anciennes colonies africaines. En réalité ces accords vident l’indépendance nationale de son contenu. Il faut que les gaullistes, les néo-gaullistes et tous les français qui pensent perpétuer la domination française sur nos malheureux pays africains se ressaisissent. Car ce sera une erreur désastreuse, les exemples cité plus haut montrent les limites d’un tel choix.
Nos pays souhaitent un partenariat loyal et une amitié sincère avec la France, mais nos pays africains ne veulent plus être une chasse gardée de la France ou des partenaires exclusifs et inconditionnels de la France encore moins des agents français, des laquais comme le fut le Shah d’Iran pour les USA, avec l’errance, la fin malheureuse et minable que nous avons retenue de lui.
Notre conception des rapports franco-africains a évolué suivant les deux lignes crêtes que nous livrons aujourd’hui aux gaullistes et aux néo-gaullistes pour que la francophobie qui couve aujourd’hui et qui risque de s’installer durablement entre nous s’atténue et cède le pas à une coopération au bénéfice de nos pays africains et de la France et non au profit exclusif de la France, dans l’humiliation continue de nos peuples.
1) La première est une ligne idéaliste, philosophique, sentimentale qui correspondait à la phase euphorique des indépendances. Nous n’étions pourtant pas aveugles sur la nature des relations définies par les « accords de communauté, ou de coopération » et qui recelaient structurellement des risques perceptibles de domination et de satellisation de nos pays africains.
La France , nation aînée, détenait les centres de décisions, occupait la position de leader du groupe. Mais on espérait, malgré tout, que l’amitié fraternelle qui était à la base de nos rapports l’emporterait sur les effets d’emprise des structures, sur l’instinct de puissance et les tentations de l’ex-colonisateur à imposer ses lois et ses volontés comme normes de coopération. Faute d’analyse objective, nous avons confondu le domaine de la science politique avec celui de la métaphysique, frayant ainsi le chemin à d’amères désillusions.
2) C’est là que nous sommes passé à une seconde ligne qui consacre notre phase de désillusion .
C ’est la découverte du réalisme politique fondé sur une analyse objective des rapports internationaux. C’est dans cette perspective qu’il faut comprendre les combats de nos pères et de nos frères d’hier : de Kwamé Nkrumah à Patrice Lumumba, du Colonel Gamal Abdel Nasser à Sylvanus Olympio, de Ruben Um Nyobé à d’Amilcar Cabral, du Commandant Marien Ngouabi, au Capitaine Thomas Sankara.
Les combats qu’ils ont menés nous enseignent qu’il n’y a pas d’exemple dans l’histoire de pays dominés qui ont réussi leur développement, ou dont le plein épanouissement national à été l’œuvre d’un autre pays. C’est grâce au pouvoir d’autodétermination conféré par l’indépendance qu’un peuple retrouve la libre disposition de lui-même et peut alors s’organiser de manière à bâtir une économie, une culture, une nation à son service.
Voilà pourquoi nous revendiquons la deuxième indépendance de nos pays africains issus de la colonisation française afin de briser le carcan étouffant des séquelles du gaullisme et du néo-gaullisme qui continuent de vicier nos rapports avec la France officielle.
Nous pouvons choisir dans cette voie l’épreuve de force à la manière du Dr Mossadegh ou du Colonel Nasser, avec la certitude de gagner à long terme ou la voie du dialogue constructif dans une renégociation qui prend en compte les intérêts des deux parties. Car en définitif, nous considérons d’une manière générale que la souveraineté d’un pays ne doit s’accommoder d’aucune allégeance quelle qu’elle soit, et que la coexistence des Etats a besoin, pour être durable et profitable à tous, doit être établie sur le respect et la considération réciproque et non sur des rapports entre tuteur et mineur. Elle doit être exempte de toute contrainte et laisser intacte, chez chacun, la capacité de choisir et de refuser.
La situation de monopole des entreprises françaises dans nos pays, leurs tendances à la surfacturation et à l’ingérence dans nos affaires, leur volonté de vouloir décider pour nous sans notre avis et cela avec le soutien des gouvernants français dont les campagnes électorales sont financés par ces entreprises et les régimes fantoches d’Afrique, nous font dire ici :
Que la vraie coopération franco-africaine doit prendre à bras le corps la lutte contre la pauvreté, pour que nous puissions avoir chez nous aussi des routes praticables en toutes saisons, des hôpitaux pour nous soigner des écoles pour éduquer et former notre jeunesse, bref, faire en sorte que des choses simples comme se loger, mettre son fils à l’école et se nourrir convenablement ne soient plus un rêve pour notre génération.
Que la gestion du francs CFA sorte complètement de l’opacité actuelle pour ne pas faire de nos pays des éternels pourvoyeurs de devises du trésor français. C’est un immense scandale qui s’apparente à du vol. Nous demandons aux dirigeants français d’ouvrir simplement leurs yeux si longtemps fermés sur la réalité africaine. Pour constater que tous les pays anglophones d’Afrique, disposent de leur propre monnaie, il n’y a pas de souveraineté sans monnaie. Une monnaie sur laquelle on a aucune emprise, une monnaie téléguidée de l’étranger n’a jamais dans l’histoire assuré le développement économique d’un peuple.
Que les dirigeants politiques Français, y prennent garde. Car ce sera la source du prochain grand contentieux franco-africain.
Avec l’armée française tirant à balles réelles sur des foules africaines et des contingents de rapatriés français fuyant l’Afrique en perdant tous leurs biens devant la colère des peuples trahis par la France officielle. Cette réalité risque de se répéter dans de nombreux pays africains.
Comme nous le montre si bien les images des évacuations en catastrophe des français d’Abidjan en novembre 2004. la crise ivoirienne deviendra un vrai cas d’école pour tous les pays africains qui étouffent sur l’emprise de l’ogre français. Devant de telles images nous sommes tous saisis par un profond dégoût vis-à-vis du gaullisme et de ses séquelles profondément enracinées dans la coopérations franco-africaine. Bref dépoussiérer les accords de coopération avec la France de ses séquelles coloniales et néo-coloniales hérité du gaullisme pour que naisse enfin après la mort du général De Gaulle , une coopération franco- africaine, accoucheuse de la deuxième indépendance de nos pays africains de l’espace francophone. Un tel changement de cap sera bénéfique à la France et lui donnera plus de poids et de crédibilité dans les relations internationales nous permettant de dire qu’elle a humanisé le gaullisme comme le résume si bien cette vieille chanson paysanne du Venezuela :

« Se Puede matar el hombre
Pero no mataran la forma
En que se alegraba su alma
Cuando sonaba ser libre »

Ils peuvent tuer l’homme
Mais ils ne peuvent tuer la façon
Dont son âme se réjouit
Lorsqu’elle rêve d’être libre.

Source : www.iacd-news.org