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LE SENEGAL PEUT - IL EVITER LE CHAOS?

Publié le, 24 octobre 2005 par

Par ABIBOU DIALLO, Rédacteur responsable questions africaines

Si Senghor, dés les années 80 a su régler sa succession il en fut tout autrement d’Houphouët Boigny. S’agrippant au pouvoir jusqu’à la mort, « le vieux » partit avec son époque et ouvrit une crise de succession dont on connaît fort bien la suite. Un mythe se brisait, à l’orée du nouveau millénaire, celui d’une stabilité structurelle de la Côte-d’Ivoire, qui allait connaître cinq coups de force en l’espace de douze mois : querelles de leadership, instabilité institutionnelle, putsch, clivage ethnique et clanique, division territoriale, etc.

D’une stabilité légendaire, la Côte - d’Ivoire est passée à une instabilité chronique ; de maillon fort du dispositif français, elle est devenue le maillon faible ; de locomotive économique de l’Afrique de l’Ouest, elle a hérité du statut de boulet humanitaire et social. Personne ne lui prédestinait un tel avenir !

Depuis lors, tous les regards se braquent sur le Sénégal. Ce pays risque-t il un jour de plonger dans un tel enfer ? Le Sénégal serait-il capable de naviguer sans chavirer dans la tourmente qui agite toute l’Afrique de l’Ouest ?

Sur le plan géopolitique, jamais le Sénégal n’a subi une aussi grande pression sécuritaire et déstabilisatrice de la part de ses voisins. A part le Mali, qui vaille que vaille maintient le cap contre vents et marées, tous les autres pays voisins sont fragiles et hautement explosifs. Au Nord, la Mauritanie sort d’un putsch militaire et a du mal à se débarrasser de l’épine islamiste et à éviter une fracture Nord-Sud. Au Sud, en dehors de l’équation casamançaise, la Guinée-Bissau, après des épisodes de soap opéras politiques, et le retour anecdotique de Nino Vieira au pouvoir, est incapable d’exorciser ses propres démons, encore moins de contrôler ses frontières et son armée.

Au Sud-Est, la Guinée-Conakry est, à l’image de son Chef d’Etat, moribond et incapable de mettre un pied devant l’autre. Après des années de dictature sans partage et des techniques sans commune mesure de prévarication des ressources naturelles, l’élite militaire affûte les armes et se prépare à une bataille pour le contrôle du pouvoir. Et la Guinée ne constitue que l’arbre qui cache la forêt. En effet, derrière son sillage se profile le Club des pays sous perfusion humanitaire : la triste Sierra Leone, l’énigmatique Liberia et la turbulente Côte - d’Ivoire. Pour dire que cette ligne de feu qui va du Nord au Sud en suivant la côte ouest - africaine constitue un gouffre d’air chaud, un boulevard large et incontrôlé capable de charrier les mouvements et trafics les plus dangereux : cette zone est devenue un des endroits du continent où les armes dites « légères » circulent le plus facilement. Les vaincus, les démobilisés, ex-enfants soldats ou anciens miliciens qui n’ont pu être réinsérés, cherchent - par les armes, en se vendant au plus offrant - à retrouver une solde et reconquérir un statut, et sont disponibles pour tous les coups de main : attaque de villages, barrages routiers, vols de bétail, arraisonnement de touristes...Et pour une déstabilisation du Sénégal, ce boulevard peut se révéler aussi dangereux qu’un fleuve en période d’inondation.

Last but not least, la Gambie, pays enclavé au sein même du Sénégal, pose de sérieux problèmes aux autorités de Dakar. Etat client et obéissant au doigt et à l’œil au guide libyen Mouamar Khadaffi, qui le soutient financièrement, la Gambie, après bien avoir tiré partie du problème casamançais, constitue aujourd’hui l’épouvantail le plus menaçant pour le Sénégal. Personne n’ignore la dangerosité et la forte capacité de nuisance et de déstabilisation de Khadaffi, ni les humeurs paranoïaques de Yaya Jammeh.
C’était d’ailleurs une des raisons qui avaient poussé, au lendemain de son accession au pouvoir, le président sénégalais à prendre le chemin de Tripoli.

Sur le plan intérieur, jamais la situation politique n’a été aussi tendue et confuse. Sitôt élu au poste de président de la République sénégalaise, Mr. Wade se dépêcha de se tailler une constitution à la mesure de son ego : concentration de tous les pouvoirs au niveau du palais présidentiel, institutionnalisation de la fonction de chef de parti et de chef d’Etat, affaiblissement renforcé des pouvoirs législatifs et judiciaires, forte instabilité institutionnelle.

…Jamais un homme politique, porté au pouvoir par un enthousiasme populaire si puissant, ne dilapida aussi vite son capital de sympathie et d’espoir. Du changement attendu, ne sortit que la perpétuation, pire l’approfondissement de pratiques clientélistes et corruptrices. Au naufrage du bateau le JOOLA avec ses 1863 victimes officielles au large des côtes gambiennes, suivit une série de scandales financiers se chiffrant par milliards de francs CFA , d’agressions physiques ou policières contre des opposants ou journalistes. Le dernier harcèlement du genre fait suite à l’interdiction d’émettre de la radio privée Sud FM le 17 octobre 2005, après la diffusion sur les ondes de l’interview du chef de la branche militaire de la rébellion casamançaise, Salif Sadio.

Si le régime se targue de bons résultats au niveau macro-économique, force est de constater que ni la pauvreté encore moins le taux de chômage, n’ont connu d’améliorations au cours de ces cinq dernières années. La famine guette toujours le monde rural alors que l’immigration, qu’en importe le coût, devient le rêve de beaucoup de jeunes sénégalais désillusionnés et déboussolés. Et à Dakar, capitale congestionnée et sale, à la cherté de la vie, s’est ajoutées les coupures intempestives d’électricité et l’épidémie de choléra. Jamais la situation économique, politique et sociale du Sénégal n’est apparue aussi critique.

A toutes ces difficultés, s’est ajoutée une guérilla politique entre l’actuel chef d’Etat, M. Abdoulaye Wade et son ancien numéro deux, M.Idrissa Seck, embastillé à la prison de Reubeuss. Les deux camps se font la guerre sans merci, sous fond de menaces, de perquisitions policières, de chasse aux sorcières, d’écoutes téléphoniques et de règlements de comptes par presses interposées.


Depuis les années 60, le Sénégal était présenté, avec la Côte - d’Ivoire comme les maillons forts du dispositif néo-colonial français en Afrique de l’Ouest. En effet, ces deux pays, dirigés par deux leaders charismatiques et disposant d’une grande légitimité et de relais puissants dans leurs propres pays, ont su tirer leur épingle du jeu Est-Ouest mais également celui plus tentant et dangereux de l’absolutisme.

Le Sénégal se situe aujourd’hui à la croisée des chemins et l’exception sénégalaise est plus que jamais menacée. L’heure est venue de se poser la question de savoir si le Sénégal n’est pas passé d’une stabilité structurelle, garantie par un environnement immédiat stable et des appuis intérieurs solides (l’interface maraboutique dans le monde paysan, consensus/alliance et participation des élites urbaines au jeu démocratique,…) à une stabilité conjoncturelle, rendue possible par la suppression des équilibres d’antan, et l’immixtion de nouvelles modalités de gestion du pouvoir politique exacerbant encore plus les positionnements partisans.

C’est vrai qu’une situation extérieure défavorable, conjuguée à des difficultés intérieures économiques, politiques et sociales constitue un cocktail explosif, néfaste à toute jeune démocratie. Le régime ivoirien a été emporté par le même cocktail et nul ne peut prévoir si le pays de la Téranga ( hospitalité), peut sortir indemne de la tempête encore moins à quel prix. La seule chose certaine, est que les élections présidentielles sont prévues dans moins de deux années et que les jeux sont loin d’être faits.