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Par DIOP Moussa
Université Paris-Dauphine

En l’espace de deux semaines d’intervalles, deux reportages diffusés respectivement sur M6 et France 2, ont porté sur les plates-formes téléphoniques (PCCI, Call Center) qui fleurissent au Sénégal. Le développement que connaissent ces « call-center » participe aux mouvements d’externalisation de certaines entreprises françaises, européennes en générale et qu’il est convenu aujourd’hui, de cacher pudiquement sous le vocable de « délocalisation », née de la mondialisation.

Ces mouvements, autant qu’ils permettent aux entreprises délocalisées de réduire leurs coûts, contribuent à la création d’emplois au Sénégal en s’appuyant sur une main d’œuvre caractérisée par sa jeunesse. Mais ces apports, à priori, incontestables ne doivent pas cacher les énormes contrecoups sociaux et culturels qu’ils peuvent engendrer. Les méthodes de recrutement dans ces « call-center, notamment aux PCCI et Call me, ne s’appuient sur aucun critère objectif et valorisant sinon que sur la capacité du demandeur d’emploi à assimiler l’accent français digne d'un vrai Parisien et docile. Or, comble de la contradiction, dans le mode de recrutement, en France, de ces mêmes entreprises qui s’exportent au Sénégal, nulle exigence n’est faite au petit breton, marseillais, toulousain ou nîmois, ou petits africain immigrés, etc.. de se débarrasser de son accent à la faveur de celui parisien pour être recruté. Cette forme de recrutement, nous le pensons, en même temps qu’il est source de discrimination, participe au déni de l’identité, source de sens et d’expérience pour l’individu. Le « petit sénégalais » à qui on demande d’assimiler l’accent parisien pour être pris comme opérateur rencontre dévalorisation et déstructuration. Sinon, comment qualifier cette phrase : débarrasser-vous ce qui vous rend unique, singulier pour espérer trouver un emploi. Le langage, dans lequel nous insérons l’accent, n’est-il plus un marqueur d’identité ?

A travers ce processus d’assimilation caractérisé par l’abandon de son identité culturelle au profit de celle imposée réveille en tout homme, africain de surcroît, de vieux démons qu’on avait déjà enterrés : la décolonisation. La plupart de ces Call-Center bénéficie d’apports d’investisseurs étrangers mais aussi d’actionnaires locaux. Ces derniers ne servant que de relais à une politique taillée sur mesure, aux désirs des clients français et imposée. Ces actionnaires locaux ne seraient alors, dans une telle perspective, que des sortes de « colabos » comme dans la France sous occupation. Leurs rôles serviraient à légitimer des pratiques avilissantes et se limiteraient uniquement à fournir une main d’œuvre taillable et corvéable pour deux bols de riz. C’est dire qu’on est de plain pied dans une nouvelle ère de colonialisme savamment orchestrée et légitimée par une prétendue mondialisation. Comble d’ignominie, notre assertion est, malheureusement, corroborée par certaines pratiques qui ont cours dans les quatre centres d’appels qui existent, pour l’instant au Sénégal (PCCI, Call me, Access Value et Center Value). En effet, pourquoi dans ces « call center » on exige aux employés d’utiliser des pseudonymes à résonance française ? En quoi un prénom et nom comme Nathalie DUVAL vaut plus qu’une Sokhna Moumy FALL ou Khadidjatou DIOP ? Un Alain LECHANTRE qu’un Mouhamadou ou Malick N’DIAYE ? Est-ce un complexe d’infériorité inter subjectivement partagé? Un processus de dévalorisation de soi ou de la culture sénégalaise ?

Même si les actionnaires locaux tirent profits de ces mouvements d’externalisation, leurs pratiques sont largement favorisées par l’inexistence de normes minimales pour le secteur. Et sans base de négociation commune, c’est la porte ouverte à des formes de pratiques pour le moins douteuses comme les conditions de travail stressantes et éreintantes, des performances fondées, non sur la qualité mais sur la quantité des appels et enfin un manque cruel de reconnaissance des qualifications des employés mais aussi de leurs compétences.

Si le gouvernement sénégalais, mais surtout les mouvements syndicaux ne s’attèlent pas à une forte mobilisation d’une population jeune et non syndiquée qu’emploient ces « call-center », il n’y aura jamais de reconnaissance de leurs statuts. Le mutisme dans lequel se terre le gouvernement est révélateur de sa complicité. Mais le politiquement correct exige, de notre gouvernement, de mettre en avant le principe du laisser-faire pour couvrir d’un voile de falsification ce déni d’identité. Face à ce néocolonialisme par le biais de l’assimilation, une seule réponse semble idoine, c’est la mise avant, par les employés, d’une « identité résistance » dont ils seront les producteurs afin, à défaut, de vivre survivre.