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ADAMA DIENG, SECRETAIRE GENERAL ADJOINT DE L’ONU SUR LES ROHINGYAS «On n’est pas loin d’un génocide contre les Musulmans».

Les violences extrêmes contre les Rohignyas considérées comme un nettoyage ethnique pourraientse transformer en génocide sirien n’est faitpour arrêterlabarbariedontsont victimeslesmusulmansdeMyanmar, la plus grande communauté apatride du monde. Adama Dieng salue les voix quise sont levées pour demander la protect

Monsieur Adama Dieng, vous êtes Secrétaire général adjoint des Nations unies et Conseiller spécial pour la prévention du génocide. Que pouvez-vous nous dire sur le sort des Rohingyas au Myanmar ?

"Mon Bureau surveille la situation des Rohingyas au Myanmar depuis un certain nombre d'années, avec une préoccupation croissante. En Novembre 2016, j'attirais l'attention, une fois de plus sur la détérioration de la situation sécuritaire, humanitaire et des droits humains dans l'Etat du Nord Rakhine. C'était à la suite des attaques perpétrées en Octobre contre des postes frontaliers de sécurité.  La réponse de l'Armée avait été caractérisée par un usage excessif de la force et des violations graves de  droits de l'homme contre la population civile, en particulier la population musulmane Rohingya. Les rapports faisaient état d’allégationsd'exécutions extra judiciaires, tortures, viols et destruction de propriété, y compris de propriétés religieuses. J'avais alors demandé que ces allégations soient vérifiées de toute urgence. J'estimais que si elles étaient fondées, la vie de milliers de personnes serait en danger et que la réputation de Myanmar, de son nouveau gouvernement et de ses Forces armées pourrait être ternie dans cette affaire. La situation qui prévaut aujourd'hui semble être pire, entrainant un exode massif des populations Rohingya et le bilan des victimes ne cesse d'accroitre."

 

 

Plusieurs voix s'élèvent ici et là pour dénoncer  un  génocide des Rohingyas. Est-ce que vous confirmez ?

"Il importe de préciser qu'il n'appartient pas au Conseiller spécial de déterminer l'existence d'un génocide en présence de telle ou telle situation. Seule une juridiction compétente pour juger des crimes internationaux, qu'elle soit internationale ou nationale, peut qualifier les faits de génocide après une enquête approfondie dans le respect des normes d'un procès  équitable. La mission d'enquête établie par le Conseil des droits de l'homme en mars de cette année a été une première étape importante vers l'établissement des faits et j'invite le gouvernement à coopérer avec cette mission au lieu de continuer à refuser l'accès à tous les observateurs internationaux des droits de l'homme. Le Rapporteur spécial du Conseil des droits de l'homme sur la Birmanie, Madame Yanghee Lee, réputée pour son indépendance,  son objectivité et son intégrité a déclaré la semaine dernière sa préoccupation et a demandéinstamment que soit rompu le cycle de violence. Tournée vers l'avenir, ma mission consiste à avertir le Secrétaire général de tout risque imminent de génocide et à proposer au Secrétaire général et au système des Nations Unies des mesures propres à éloigner ce risque. Au moment de l’établissement de mon mandat, Koffi Annan disait : « Si nous sommes vraiment décidés à prévenir ou à mettre fin à tout génocide dans l'avenir, nous ne pouvons-nous empêtrer dans des arguties juridiques sur le point de savoir si telle ou telle atrocité répond ou non à la définition du génocide. Le temps que nous nous entendions, il est souvent trop tard pour agir. Nous devons en reconnaitre les signes annonciateurs ou potentiels, de sorte de pouvoir intervenir à temps pour le prévenir… ». En rappelant ce propos, je voudrais simplement dire que ce qui est attendu des autorités de Myanmar et de la communauté internationale c’est d’agir urgemment pour faire cesser les violations commises contre les Rohingyas, en d’autres termes prévenir les atrocités criminelles à  savoir le crime de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre." 

 

Peut-on alors parler de nettoyage ethnique dans l'État de Rakhine?

"A la lumière des éléments dont nous disposons, il y a un faisceau d’indices graves et concordants qui pourraient, à l’issue d’une enquête indépendante, conduire à qualifier les violations qui se commettent de crime contre l’humanité. Je dois préciser que le nettoyage ethnique n'est pas érigé en crime autonome en droit international. Il a été défini dans le contexte de la guerre dans l'ex-Yougoslavie, par une commission d'experts des Nations Unies comme suit: « … rendre une zone ethniquement homogène en utilisant la force ou l'intimidation pour faire disparaître de la zone en question des personnes appartenant à des groupes déterminés ». En d'autres termes, le nettoyage ethnique relève «…d'une politique délibérée conçue par un groupe ethnique ou religieux visant à faire disparaître, par le recours à la violence et à la terreur, des populations civiles appartenant à une communauté ethnique ou religieuse distincte de certaines zones géographiques ». Pour plus de clarté, il sied de rappeler que la même Commission d'experts a énuméré les mesures coercitives suivantes employées pour faire disparaître les populations civiles: assassinats, tortures, arrestations et détentions arbitraires, exécutions extrajudiciaires, viols et autres sévices sexuels, graves dommages corporels causés aux civils, confinement de populations civiles dans des ghettos, expropriations forcées, déplacements et déportations de populations civiles, attaques militaires délibérées ou menaces d'attaques des civils et des zones civiles, utilisation de civils comme boucliers humains, destruction de biens personnels, vols de biens personnels, attaques contre les hôpitaux, le personnel médical et les installations portant l'emblème de la Croix-Rouge/du Croissant-Rouge, entre autres. Vous comprendrez qu’il soit légitime de parler de nettoyage ethnique dans le contexte des violences qui se commettent contre les Rohingya.Bien entendu, ces pratiques « … constituent des crimes contre l'humanité et peuvent être assimilées à des crimes de guerre bien définis. Qui plus est, elles pourraient également relever de la Convention sur le génocide ».  

La communauté internationale n'a-t-elle pas la Responsabilité de protéger les Rohingya? 

"Je tiens à rappeler que la responsabilité première de protéger les populations Rohingya sur le territoire Birman incombe au gouvernement du Myanmar. Cependant, la communauté internationale a également la responsabilité non seulement de soutenir Myanmar pour s'acquitter de cette responsabilité, mais aussi de plaider en faveur d'une action efficace pour aborder à la fois les causes profondes et les conséquences de la violence dans l'État de Rakhine. La réunion du Conseil de sécurité des Nations Unies le 30 août a été une première étape, mais beaucoup plus est nécessaire pour arrêter le cycle de violence et de discrimination auquel les Rohingyas continuent de faire face.  Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, est monté en première ligne en attirant l’attention du Conseil de sécurité sur la gravité de la situation actuelle et le risque d’une catastrophe humanitaire avec des implications pour la paix et la sécurité qui pourraient s’étendre au-delà des frontièresbirmanes. Tout en relevant la responsabilité principale du gouvernement de Myanmar d’assurer la sécurité et assister tous ceux qui sont dans le besoin, il estime qu’une action collective et un engagement actif de la communauté internationale sera cruciale afin de s’assurer que la situation ne s’empire et ainsi aider à prévenir les souffrances auxquelles font face les communautés vivant dans l’état de Rakhine. Il en appelle à tous les membres du Conseil de sécurité pour contribuer à éviter une catastrophe humanitaire. J’ose espérer que son appel sera entendu. Demain, aucun membre du Conseil de Sécurité ne dira pas qu’il n’était pas averti. Nous sommes un seul Monde, une seule Humanité."

Ce mercredi 6 septembre, le Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres, a parlé de la  responsabilité de protéger  devant l’Assemblée générale. Pouvez-vous nous en dire deux mots ?

"Effectivement, le Secrétaire général a présenté son premier rapport sur la responsabilité de protéger. A cette occasion, il a appelé à la prise de mesures concrètes pour protéger les personnes vulnérables face aux crimes d'atrocités (les crimes contre l'humanité, de guerre, de génocide, et de nettoyage ethnique) qui selon ses mots « sont loin de faiblir dans de nombreuses parties du monde ». Aussi a-t-il lancé un appel à tous pour renverser ces tendances négatives. Pour y parvenir, il a proposé dans son rapport des mesures concrètes pour lutter contre ces crimes. Il estime que l'ONU doit accorder une attention beaucoup plus grande à la résolution des problèmes avant qu'ils ne prennent des proportions démesurées  et deviennent hors de contrôle. Le Secrétaire général a également exhorté le Conseil des droits de l'homme et le Conseil de sécurité à renforcer leur capacité à prévenir les risques de crimes et d'autres violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire. Quoique reconnaissant que « La responsabilité de protéger génère toujours de l'inconfort pour un certain nombre d'États », et réaffirmant son profond respect pour la souveraineté nationale, le Secrétaire général a tenu à rappeler que la réussite des Nations Unies dans la mise en œuvre de ses mandats dépend de la capacité des acteurs nationaux à pouvoir s'acquitter de leurs responsabilités souveraines. « Mais si les autorités nationales échouent manifestement à protéger leurs populations contre le génocide, les crimes de guerre, le nettoyage ethnique et les crimes contre l'humanité, nous devons être prêts à prendre des mesures collectives, conformément à la Charte, y compris le chapitre VII, au cas par cas », a-t-il prévenu."

La responsabilité de protéger, instrument vital qui incombe originellement aux Etats comme vous venez de le développer, ne souligne-t-elle pas la nécessité d’ouverture de ces derniers vers un plus grand concept, notamment dans la perspective de prévention : celui de la coexistence ?  

"Le moment est aujourd'hui pressant pour les autorités de Myanmar d’assurer pleinement leur responsabilité de prévenir  toute forme d’atrocités et de s’affranchir de leur devoir d’améliorer le rapport de leur population aux valeurs d’une coexistence civile. Cette coexistence suppose la reconnaissance de l’égale dignité des croyances et la protection des minorités nationales, ethniques, religieuses ou autres. L’histoire moderne nous l’a démontré à plusieurs reprises : le rôle premier des gouvernements et des institutions internationales ne sert pas seulement à assurer un équilibre sain, mais aussi à protéger des valeurs universellement et spirituellement reconnues : celles de l’acceptation de l’autre et de la reconnaissance de l’altérité. En d’autres termes, nous devons œuvrer pour l’émergence d’un monde dans lequel nous trouvons une issue beaucoup plus positive que celle portée par les rapports de force, la négation de l’autre, la domination, les conflits et les guerres. C’est bien là que se joue le rôle clef des Nations Unies et de la communauté internationale dans son ensemble dans le contexte des évènements graves qui se déroulent au vu et au su de tous :celui d’aider ses Etats Membres, dont le Myanmar, à embrasser la vision de la coexistence, une vision intemporelle et nécessaire aujourd’hui plus que jamais." 

 

Propos recueillis par El Hadji Gorgui Wade Ndoye.