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Bien qu’unanimement reconnu comme indissociable d’une pratique éclairée du multilatéralisme respectant les principes d’universalité et d’égalité, la pratique du multilinguisme est quelquefois perçue comme une contrainte et un coût dispendieux. Conscient du droit fondamental des peuples à comprendre et à se faire comprendre et de la nécessité d’assurer la parité dans la publication de la documentation ou la publication de l’information pour tous et de disposer d’un personnel véritablement multilingue, le système des Nations Unies a mandaté un Sénégalais fin connaisseur de la diplomatie pour lui présenter un rapport sur «La situation du multilinguisme dans les organismes du système des Nations Unies». 

GENEVE- Seul sénégalais membre du Corps commun d’inspection (CCI) des Nations Unies depuis sa création en 1976, l’inspecteur Papa Louis Fall, ancien ambassadeur du Sénégal à New York, Ancien Formateur “Section Diplomatie” du Centre de Formation et de Perfectionnement  administratif (CFPA) et de l’Ecole Nationale d’Administration du Sénégal (ENAS), a, ainsi, la lourde de tâche au nom du CCI de faire « l’état des lieux » du multilinguisme à l’échelle du système des Nations Unies.  

 

Dans un récent sondage effectué au sein des Nations Unies à Genève (ONUG), on note que 98 pour cent du personnel ont indiqué qu'ils utilisaient l'anglais au travail, 87 pour cent le français, 34 pour cent l’espagnol et 10 pour cent le Russe. « Ce qui démontre que l'ONUG peut s'appuyer sur un staff véritablement multilingue » s’est réjoui le directeur général sortant Sergei Orzhonikidze qui met ces résultats sur le compte des efforts de formation menés par l’ONU. Pourtant le déséquilibre entre les différentes langues officielles saute aux yeux. La documentation soumise pour traduction à Genève est essentiellement reçue en langue anglaise. Pour l’année 2010, 73.5 % des documents ont été soumis en originaux anglais et 14.9% en originaux français. « Cette répartition reste stable par rapport aux années 2008 et 2009, avec une légère augmentation des soumissions en langues arabe et russe à hauteur de 2.9 % respectivement contre 0.8% et 1.9% pour la période précédente », souligne M. Ala Almoman, Point focal pour le multilinguisme au sein de l’ONU, qui rappelle que pour 2010, 8 695 réunions ont été tenues ou servies par l’ONUG et 177 982 pages traduites.  

Dans ses multiples résolutions, y compris la dernière (A/RES/63/306 du 9/9/2009), l’Assemblée Générale (AG) des Nations Unies ne cesse de rappeler que l’universalité de l’organisation mondiale et son corollaire, le multilinguisme, impliquent, pour chaque Etat Membre, le droit et le devoir de se faire comprendre et de comprendre l’autre. Et l’AG de souligner, pour ce qui concerne l’ONU, la nécessité primordiale d’assurer, à tous, l’accès à la documentation, aux archives et banques de données de l’ONU dans toutes les langues officielles, en invitant le Secrétaire Général à veiller à la stricte application des résolutions sur le régime linguistique, pour les langues officielles de l’Organisation comme pour les langues de travail du Secrétariat. « C’est pour ces raisons que, dans le sillage d’un rapport antérieur sur le multilinguisme (JIU/REP/2002/11), le CCI a décidé, dix ans après et sur les pressantes instances de la FAO, du Comité des Commissaires aux Comptes (CCC/BoA) de l’ONU et du Secrétariat Général (DGACM), d’inscrire, dans son programme de travail 2010/2011, la préparation d’un rapport sur la « Situation du multilinguisme dans les organisations des Nations Unies », rapport dont la coordination m’a été confiée, en co-production avec mon distingué Collègue Chinois, l’Inspecteur Yishan Zhang », précise, lors d’un séminaire co-organisé par la Francophonie et les Nations Unies, le Représentant spécial du Président de l’OUA aux Négociations sur le Rwanda (Arusha 10/7/92–4/8/93) et ancien Représentant spécial du SG/OUA au Burundi (1993-94) etc. Le rapport du CCI destiné à l’Assemblée Générale, devrait s’articuler autour d’un examen des dispositions concernant les effectifs et les mécanismes de financement des services linguistiques, d’un inventaire des meilleures pratiques et de la formulation de recommandations concrètes quant aux mesures requises pour mieux s’attaquer à la problématique évoquée plus haut et aux questions connexes. « Celles-ci seraient liées, par exemple, aux examens d’aptitude linguistique sur les recrutements, aux programmes d’apprentissage des langues, aux difficultés d’accès à l’information et à la documentation, au développement du site Web de l’ONU dans une perspective de parité des langues officielles », a annoncé Pape Louis Fall, sans vouloir entrer dans les détails laissant la primeur aux Chefs d’Etats et à Ban Ki Moon, Secrétaire Général des Nations Unies.

On peut, cependant, avancer que le CCl va, sous peu, boucler le travail d’évaluation conduit dans des domaines aussi essentiels que le rôle des Etats Membres, le respect des cadres formels par rapport aux activités du secteur linguistique, les rapports dialectiques entre contraintes budgétaires et exigences de qualité et de continuité des services de conférence, l’intégration plus systématique du critère langues dans les processus de recrutement, les plans de relève d’un personnel linguistique qui perdra 20% de ses effectifs d’ici a 2015, la conclusion de partenariats et la construction de réseaux dans le domaine des langues (IAMLADP).

Créé en 1976 par l’Assemblée Générale de l’ONU, le CCI est le seul organe de contrôle externe indépendant, mandaté par l’AG  aux fins de mener, à l’échelle du système des NU, des évaluations, inspections et enquêtes, eu égard au triple souci des Etats Membres, de renforcer l’efficacité des services et le bon emploi des ressources, d’améliorer la gestion et les méthodes de travail, tout en impulsant la coordination intersystème et le partage de l’information. Les 11 Inspecteurs, basés à Genève, sont nommés par l’AG/ONU, après consultation des organisations du Système.

El Hadji Gorgui Wade NDOYE