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Invitée d’honneur du Centre de Politique de Sécurité de Genève, Mme Michelle Alliot Marie a abordé un thème " qui concerne tous, experts civils ou militaires, universitaires, diplomates, hommes politiques ou journalistes. Il s’agit des nouveaux défis sécuritaires auxquels nous devons faire face en ce début de 21ème siècle et des réponses que nous, Européens, pouvons y apporter".

I - Les défis d’un monde fragmenté

1. Le premier défi qui nous préoccupe, c’est celui du terrorisme.

Le terrorisme n’est pas un phénomène nouveau. De nombreux pays, dont la France, ont souvent été frappés par une terreur aveugle et gratuite.

Pourtant, ne nous y trompons pas : il y a dans le terrorisme de masse une forme de nouveauté inquiétante.
Les actes terroristes survenus à partir du 11 septembre 2001 à New York, Madrid, Istanbul, Rabat, Karachi, Londres, Charm el-Cheikh, se sont manifestés dans des modalités aussi spectaculaires qu’inédites.

Le caractère massif et anonyme de la cible, la pulsion auto-sacrificielle du tueur prêt à mourir, l’absence de revendication réelle sont particulièrement préoccupants.

Il est d’autant plus difficile d’anticiper les attentats et de neutraliser leurs auteurs que ceux-ci semblent bien intégrés dans la société, le plus souvent inconnus des services de renseignements.

A la structure unique plus ou moins cloisonnée des groupes traditionnels a succédé une sorte de filialisation de réseaux de plus en plus autonomes.

Al-Qaida est aujourd’hui une « marque », voire une franchise.

Parmi les périls que les experts s’efforcent d’analyser, le terrorisme a donc acquis un statut singulier.


Il pose aussi à tous les pays concernés un problème politique inédit. Comment répondre efficacement à cette menace sans pour autant pénaliser les libertés individuelles ?

Les atteintes trop massives aux libertés peuvent engendrer ou favoriser d’autres actions terroristes.

En fin de compte, ce sont souvent aux citoyens eux-mêmes que revient la responsabilité de définir le bon équilibre entre liberté et contrôle.

2. Le second défi, ce sont les armes de destruction massive.

Le nucléaire, tout d’abord.

Longtemps, l’arme nucléaire fut réservée aux grandes puissances. Elle a permis, pendant la guerre froide, d’instaurer un équilibre de la terreur entre les deux grands d’alors.

C’est justement son caractère apocalyptique qui a fait de cette invention la meilleure garantie de la paix mondiale.

La capacité nucléaire est donc devenue un critère de puissance et de souveraineté en même temps qu’une garantie ultime de la protection du territoire national.

Conscients du danger que ferait courir à la planète la prolifération nucléaire, les Etats parties au Traité de Non-Prolifération de 1968 ont inscrit dans le droit international sa limitation.

On a vu toutefois l’émergence de nouvelles capacités : l’Inde, le Pakistan, Israël.

D’autres pays, comme l’Iran ou la Corée du Nord cherchent aujourd’hui à rejoindre ce club nucléaire, ainsi qu’à se doter de lanceurs qui conférerait à leur capacité une dangerosité maximale.
L’implosion de l’Empire soviétique a aussi eu des conséquences néfastes : dans le chaos qui a suivi la fin de l’URSS, des matières nucléaires ont pu, en l’absence de contrôle efficace, circuler et tomber entre des mains peu recommandables.
Aujourd’hui, le risque existe que des groupes terroristes ou même mafieux soient en mesure de concocter artisanalement une bombe sale.

Le risque nucléaire contribue donc à affaiblir la sécurité collective.

Les armes chimiques, de leur côté, sont aussi de fabrication aisée. Utilisées dans une attaque suicide, elles seraient particulièrement redoutables comme l’a prouvé l’attentat au gaz sarin au Japon.

Quant aux armes bactériologiques, si elles nécessitent des modes de production bien plus sophistiqués, elles n’en constituent pas moins un vrai danger, d’autant qu’elles ne sont pas décelables dans un laps de temps permettant une réaction rapide.

3. Le troisième défi est celui des conflits régionaux

Parallèlement au terrorisme, la guerre traditionnelle sévit toujours en de multiples points de la planète.

De nombreux conflits armés persistent.

Certains évoquent plus de 70 conflits actuellement en cours, et 400 mouvements de contestation violents.

Du Caucase à l’Angola, de la Palestine au Pakistan, de l’Afghanistan à l’Afrique, sans oublier l’Irak, de gigantesques arsenaux, issus notamment de la désintégration de l’URSS, alimentent ces conflits et nourrissent les trafiquants.

On pourrait ajouter la multiplication des « zones grises ».

Ces régions échappent à toute règle, nationale comme internationale, tant en raison de l’accès à une indépendance de fait de certaines provinces que de l’émergence de nouveaux groupes.

Outre l’Afrique subsaharienne, cette instabilité chronique touche le Caucase et l’Asie centrale.

Dès lors qu’aucune autorité n’est en mesure de faire régner l’ordre, ces régions offrent d’incomparables sanctuaires aux activités illégales et aux mafias.

En Afghanistan, les trafiquants de narcotiques et les seigneurs de la guerre apparaissent comme des alliés objectifs unis par leur hostilité à toute recomposition de l’Etat.

Face à ces nombreuses situations explosives, il convient d’apporter des réponses : même si elles ne sont pas seulement militaires, elles sont avant tout militaires.

Il convient d’établir une politique de défense réaliste et ambitieuse, à la hauteur des périls.
La France a depuis trois ans une loi de programmation militaire qui lui donne les moyens d’assumer ses responsabilités, à l’égard de ses concitoyens comme de ses alliés.

Pourtant, c’est au niveau européen que les réponses doivent être trouvées.

II - Les réponses européennes

Depuis le sommet de 1998 à Saint-Malo entre le Président de la République Jacques Chirac et le Premier ministre Tony Blair, la défense européenne a connu des avancées considérables, en dépit des hésitations de l’Europe politique et du « non » aux referenda en France et aux Pays-Bas.

1) Tout d’abord, l’Union européenne est devenue un acteur crédible et reconnu dans la gestion des crises militaires.

La PESD s’est illustrée à de multiples reprises :

  • par la réussite des opérations de gestion de crise de l’UE sur le terrain, comme en Macédoine, en République démocratique du Congo et aujourd’hui en Bosnie.
  • par la contribution d’unités et de contingents en majorité européens aux opérations de l’OTAN en Afghanistan et au Kosovo.

Les autres opérations au Darfour, en République Démocratique du Congo, en Indonésie permettent aux Européens de s’impliquer dans des domaines nouveaux, couvrant un large spectre d’actions civiles et militaires.

Dans certains cas, nous avons d’ailleurs reçu l’aide de nos amis de la Confédération helvétique : ce fut le cas lors du tsunami, lorsque des hélicoptères suisses ont été intégrés au continent français dans l’Océan Indien.

Des militaires suisses participent également à l’ISAF en Afghanistan ou à l’opération de l’UE en Bosnie.

2) En second lieu, nous avons renforcé les outils de l’UE lui permettant d’élargir son champ d’action, en complémentarité avec l’action de l’OTAN

Je trouve absurde tout esprit de concurrence entre l’Union Européenne et l’OTAN.
Au contraire, en matière de sécurité et de défense, les moyens européens et américains se complètent et se renforcent mutuellement.

Les enjeux actuels justifient une coopération approfondie.

Chacun d’entre nous a des atouts spécifiques, des liens particuliers avec certains acteurs régionaux, des méthodes de gestion de crises propres et différentes.

En fonction des situations, nous pouvons, grâce à cette diversité, choisir d’agir tantôt dans le cadre de l’Alliance, tantôt dans celui de l’UE avec les moyens de l’OTAN, ou encore de façon autonome.

Ce sont les trois cas de figure qui permettent de répondre aux crises avec réactivité et efficacité.

Notre ambition est de multiplier le nombre d’instruments à la disposition de l’Union européenne en réponse à une crise.

La création d’une Force de Gendarmerie Européenne avec mes homologues espagnol, portugais, italien et néerlandais, permettra de couvrir la totalité du spectre des missions de sécurité publique lors des différentes phases d’une crise.

Nous avons également développé des capacités de réaction rapide autonomes.

Aujourd’hui, 20 Etats membres et la Norvège se sont déjà engagés à former 13 groupements tactiques.

Je souhaite aussi que le centre de conduite d’opération soit rapidement mobilisé.

Seul un centre européen permettra en effet aux citoyens européens de visualiser l'engagement de l'Union et de se l'approprier.
Pour accompagner les futures opérations de l’Union, nous devons développer une culture stratégique européenne commune.
C’est le sens de la création du Collège européen de défense et de sécurité, qui fonctionne déjà de manière exemplaire.

Dans le domaine de la formation, nous avons déjà beaucoup de coopérations bilatérales dans ce domaine qui peuvent servir de point de départ.

3) En troisième lieu, nous sommes en train de constituer les capacités adéquates pour l’Europe de la défense

Sur le plan industriel, l’Europe de la défense devient une réalité, à travers les programmes communs de l’Airbus A400M, de l’hélicoptère de transport NH90, de l’hélicoptère de combat Tigre, du missile Météor, des frégates multi-missions, des démonstrateurs de drone UCAV ou encore des satellites Hélios et Syracuse dans le domaine spatial.

Il faut poursuivre ces efforts dans ce domaine.

Le comblement des lacunes ne pourra être acquis que grâce à un engagement fort des nations, y compris sur le plan financier.
Créée en 2004, l'Agence européenne de défense constitue l'exemple même de ce que les Européens sont capables de faire pour faire progresser la construction européenne.

Elle doit donner une nouvelle dynamique au développement capacitaire de l'Union européenne.
Dans le domaine de la recherche, elle devra aussi jouer un rôle de facilitateur et de fédérateur des efforts des Etats membres.
L'Europe doit rattraper son retard en la matière : nous devons être capables de maîtriser ensemble les technologies critiques.
L'Agence doit disposer des ressources à la hauteur de l’ambition que nous avons pour elle et des résultats concrets que nous en attendons.

Je suis personnellement déterminée à ne pas ménager le soutien français pour que l'Agence puisse prendre sa vraie place au cœur de la construction des capacités européennes.

En conclusion, je voudrais vous faire partager ma conviction que la Défense a un rôle clé à jouer pour relancer l’idée européenne.
Nous sommes tous conscients des incertitudes survenues après les referenda français et néerlandais du printemps dernier.
L’Union Européenne suscite toutefois le respect de nombreux pays.
Elle possède la deuxième devise internationale. Elle demeure la première puissance commerciale du monde.
Elle véhicule des valeurs essentielles dont nous devons être fiers, une vision du monde.

Et lorsqu’on parle de l’Europe, il est clair qu’il faut se placer dans une perspective plus large que l’UE incluant évidemment un pays ami comme la Suisse.
C’est pourquoi, face aux nombreux défis sécuritaires actuels, l’Europe doit pouvoir posséder une capacité commune à défendre ces valeurs.
La Politique de Défense et de Sécurité commune est une réalité forte.
Elle a ses savoir-faire propres, ses instruments, ses modes de fonctionnement.

Cette politique correspond à une véritable attente, aussi bien chez les citoyens de l’Union Européenne que dans les pays voisins qui veulent en faire partie.

Les Européens savent que le développement de la PESD contribue à leur sécurité au quotidien.
Pour ma part, je souhaite que la Défense continue à montrer la voie d’un projet européen qui, n’en doutons pas, reprendra très vite son cheminement.

Soyez assurés que j’y mettrai toute mon énergie.