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* Par Mamadou Diouf, Middle East and Asian Languages and Cultures Department

History Department- Directeur, Institute of African Studies- Columbia University, New York 

Le document de travail de la conférence internationale de Kairouan sur «Le Dialogue des Civilisations et la Diversité Culturelle» propose une analyse précise et convaincante de la situation de la situation actuelle sur deux des questions qui sont au cœur des conflits entre communautés, nations, états et régions du monde : la reconnaissance et le respect de la diversité culturelle d’une part et le dialogue entre cultures différentes pour promouvoir la paix et l’émergence, pour reprendre Léopold Sédar Senghor, de la civilisation de l’universel», d’autre part.  

A partir du constat des convergences inachevées, sur des questions décisives telles que le maintien de la paix et de la sécurité commune, la croissance maitrisée et partagée et le développement durable, le document dresse le tableau suivant : une crise financière qui pourrait  provoquer l’élévation de barrières protectionnistes et la remise en cause des gains de croissance réalisées par les pays les moins développés qui se combinerait avec l’appauvrissement des plus pauvres ; le recul des tentatives d’instauration de pratiques communes de bonne gouvernance et de respect des droits de la personne humaine ; la difficile mise à l’œuvre et à l’épreuve des principes contenues dans de la Convention sur la protection et la promotion de la Diversité des Expressions Culturelles de l’UNESCO (2005) et l laDéclaration Islamique sur la Diversité Culturelle de l’ISESCO (2006).  

La Convention tout comme la Déclaration ont certes ouvert des débats très intenses et des réflexions très productives, elles n’ont pas empêché,

  • la multiplication des agressions physiques et intellectuelles xénophobes et le succès populaires des mouvements politiques ouvertement racistes dans plusieurs régions du monde ;
  • une imbrication plus forte des cultures et des populations, suite à l’intensification des mouvements migratoires et la constitution de diasporas ethniques et religieuses dans plusieurs régions du monde, en particulier les diasporas des pays anciennement sous domination coloniale dans les anciennes métropoles impériales et, en dernier lieu,
  • l’extraordinaire force des retours identitaires et des théories, pratiques et politiques qu’elles mettent en mouvement.
 

En cause la possibilité ou non de s’approprier les gains du Siècle des Lumières – la modernité et la liberté - d’en rénover le récit pour y inclure des histoires autres que celles de l’Occident dans sa phase ascendante ou simplement, de le rejeter. Léopold Sédar Senghor et Aimé Césaire ont tenté, par le recours à la Négritude comme un nouvel humanisme, avec quelques réussites, à se situer dans la seconde option, celle de la rénovation et de l’ouverture du récit de la modernité avec des propositions telles que la « civilisation de l’universel » qui serait le produit du rendez-vous du « donner et du recevoir » de toutes les civilisations humaines. Une fusion qui sauverait la civilisation humaine de la deshumanisation, des sociétés occidentales et de celles qu’elles ont assujetties, dans l’entreprise coloniale. Est-il possible d’altérer le récit de l’Histoire décrit comme le déploiement et la réalisation de la raison (Hegel), un territoire duquel les sociétés non occidentales à des titres et des degrés divers sont, de manière paradoxale exclues et constamment inventées ? Un double processus d’exclusion et d’invention qui a produit la « bibliothèque des idées reçues”1 et « la bibliothèque coloniale »2 . 

Une telle posture signifierait-elle, le refus d’accorder à l’histoire et au récit des Lumières une vérité absolue qui les qualifierait comme horizons indépassables, pour précisément insister  sur la contingence des événements et l’indétermination des concepts historiques avec lesquelles nous tenons d’en rendre compte? Ne peut-elle pas nous conduire dans des philosophies culturalistes relativistes, postmodernes, « postcoloniales » et profondément  multiculturelles de leurs divers fragments. Ce qui aurait comme conséquence la dissolution du projet humaniste et véritablement universaliste? 

La meilleure mise à l’épreuve de cette discussion est le travail de Paul Gilroy, The Black Atlantic: Modernity and Double Consciousness (1993). Dans son analyse de la diaspora noire, il s’en prend autant à la conception nationaliste intégrée des cultures comprises comme des « expressions ethniques exclusives et immuables » qu’à la conception de la « modernité entendue comme une rupture radicale dans l’histoire et l’expérience des ‘noirs’ et des ‘blancs’ ». Il propose une théorie de la créolisation et de l’hybridation qui résonne admirablement avec les théories du métissage de L. S. Senghor et de la « philosophie de la relation », la poétique du divers », « la mise hors la loi » et du « tout-monde » d’Édouard Glissant. Gilroy remet en cause la pertinence, plus précisément l’adéquation des concepts de « race », « nation » et civilisation pour rendre compte des expériences collectives des communautés humaines, dans leurs engagements avec leurs cultures et celles des autres rythmés par expériences idéologiques et la création de nouvelles cultures.   
 

Ma réflexion s’intéresse à une histoire longue, pour proposer un état des lieux qui ne se limitent pas à une discussion institutionnelle. Elle permet de suivre à la trace la construction des autres cultures et civilisations par l’Occident, dans ses multiples variations, ses objets (l’identité, la coutume, la religion) et les réactions qu’elle a suscité, le désir d’assimilation ou d’intégration, l’indifférence ou le rejet radical. Elle s’intéresse aussi à un moment particulier : la mise en réseau des mondes européen, africain et américain sous l’impulsion et la conduite de l’Europe en expansion. Elle ne manque pas pour autant, dans son déploiement, d’incorporer le système-monde de l’océan Indien.  

Il est en effet clair que le débat sur la diversité et le dialogue des cultures est fortement marqué par l’expansion de l’Europe, sa « découverte » des autres cultures et civilisations et la domination militaire, politique et économique qu’elle a exercée sur celles-ci. Une domination qui a produit un savoir, des représentations et un imaginaire qui continuent d’être présents et dont la mission était triple et paradoxale en même temps : établir la vocation/le mandat civilisateur ; identifier l’indigène exotique et maintenir sa différence (rule of difference) qui fonde la vocation de l’Européen à le civiliser et l’assujettir.

Plusieurs figures rendent compte de l’universalité qui accompagne l’expansion territoriale européenne et la mise en place de son hégémonie politique, économique et sociale. Dans le même mouvement, elle concède à l’Europe le monopole de l’initiative historique et institue la mission civilisatrice pour incorporer les populations non-européennes dans une histoire ayant cessé d’être géographiquement déterminée. La mission civilisatrice repose sur la promesse d’une raison et d’une émancipation universelles qui, portées par les philosophies des Lumières, associent la modernité, le progrès et de puissantes capacités de destructions des pratiques irrationnelles et non-raisonnables, dans la lutte entre la science et la rationalité d’une part, la foi et la religion de l’autre. Compris ainsi, l’universel est un moment unique de l’histoire de la civilisation occidentale dont les principaux signes sont : la laïcité, l’humanisme et surtout la modernité, le progrès technique et scientifique (dont la révolution industrielle est le couronnement et la rythmique), les transformations économiques et sociales du capitalisme.

William Connolly propose une identification convaincante des éléments clefs de l’universalisme porté par la philosophie des Lumières qui repose sur la séparation radicale entre la « foi religieuse » et« l’argument laïque ». À la première sont associés les croyances et rituels religieux qui ressortissent à la sphère privée. Concernant le second, en revanche, l’argumentation rationnelle est du ressort de la sphère publique. Ainsi que le note Connolly, « la nature laïque de la vie publique est indispensable à la liberté individuelle, au pluralisme démocratique, aux droits individuels, à la raison publique et à la primauté de l’Etat »3. La centralité de la laïcité comme mode dominant de l’expression de la politique témoigne avec force du caractère historique et contingent de l’universalisme et de ses attributs, instituant  au passage des principes et régimes dominants d’organisation des connaissances et des représentations. 

En bref, deux principes paraissent avoir guidé le déploiement de l’universalisme occidental : l’expression d’une rationalité scientifique et l’insistance sur les formes et formules de la démocratie. L’insistance en particulier sur la laïcité et les valeurs humaines exclut la religion du domaine public. 

Le contexte colonial noue la discussion autour précisément de l’héritage de la « modernité » occidentale, de la possibilité ou non de son appropriation ou de sa remise en cause. Il s’agit de savoir s’il possible, dans les sociétés postcoloniales, de sauver la modernité occidentale et son attribut, l’universalité et à quelles conditions. Ou encore, est-il absolument nécessaire de la remettre radicalement en cause en exhumant des modernités alternatives plurielles, indigènes ou vernaculaires. Ces interrogations indiquent la nécessaire liaison entre la connaissance que nous avons du passé, la compréhension que nous avons du présent et notre projet pour le futur. Ne s’agit-il pas d’établir les spécificités et résiliences des traditions propres aux sociétés dans des situations de rencontre avec d’autres sociétés, cultures et civilisations ? La mobilisation politique, sociale et culturelle a-t-elle besoin de références ethniques, religieuses ou raciales ? Peut-on (doit-on) aller au delà des limites fixées par une imagination morale dont les sources et ressources sont bornées par une culture, une religion ou un système philosophique ou politique ? Est-il possible, souhaitable de mettre en pratique l’invite d’Aimé Césaire, réagissant à la publication de la traduction de La Phénoménologie de l’Esprit de F. W. Hegel par Jean Hyppolite (1941) : «  quand la traduction de la Phénoménologie apparut pour la première fois, je l’ai montrée à Senghor en lui disant : Écoutes ce que dit Hegel, Léopold : Pour arriver à l’universel, il d’abord s’immerger dans le Particulier »4 

Le moment fondateur est celui d’une temporalité qui institue l’Occident, son expansion territoriale, sa découverte (l’« invention », pour utiliser le concept retenu par E. Said5,T. Ranger6 et V. Y Mudimbe7) des autres peuples et leur identification, leur classification et leur inscription dans l’histoire et la géographie de l’Europe, comme histoire première. Elle décrète, comme l’unique référence et la seule mesure de la condition humaine et de la civilisation, ses typologies religieuses, culturelles, scientifiques, morales et philosophiques. Elle confisque à son seul profit l’initiative historique. Elle y associe une cartographie imaginaire de l’univers et une philosophie universaliste qui déclinent conjointement de nouvelles conceptions impériales de domination politique et une modernité s’octroyant le droit d’imposer des formules culturelles et religieuses, en une tension permanente qui a assuré fluidité et flexibilité à la domination coloniale dans ses différentes figures.  

Le débats et controverses autour des conséquences de l’expansion européenne sur le système-monde de l’océan Indien n’ont pas perdu de leur intensité. Historiens, romanciers, poètes et experts en sciences sociales continuent à échanger des arguments de plus en plus sophistiqués et informés. En contraste avec le monde atlantique en formation, l’océan Indien précolonial était caractérisé par un trafic constant de capitaux, de travail, d’idées, de savoirs, de formules culturelles qui ont participé amplement à la configuration d’une modernité et d’un universalisme, dont les piliers commerciaux et financiers s’enfoncent solidement dans un territoire compris entre Zanzibar, sur la côte africaine, et Singapour, en mer de Chine.

Pour certains, cet espace commercial, culturel et financier, animé par les marchands indiens et chinois principalement, aurait constitué un « système international spécifique »8. Pour d’autres, il fut submergé par la domination politique et économique européenne, au cours de la seconde moitié du XVIIIe siècle qui réussit la destruction de son unité organique. Une thèse rejetée par ceux qui affirment que  l’océan Indien « ne perdit jamais son identité dans un monde largement dominé par l’Occident »9.

La trajectoire singulière de la région se serait réalisée autour de trois nœuds unitaires :

  • un nœud racial construit par des flux migratoires continus ;
  • un nœud culturel dont la rythmique et les pulsions sont indiennes et,
  • finalement un nœud religieux configuré par l’expansion de l’Islam, une religion universaliste dont l’unité, en constante renouvellement, s’accommode de variations régionales et culturelles10.
 

Il faut noter cependant que des divergences subsistent entre historiens, relativement à la géographie et à l’histoire du monde de l’océan Indien, auxquelles on devrait administrer les mêmes instruments et interrogations mis à l’épreuve par Fernand Braudel pour la Méditerranée et le monde méditerranéen11.  

K. N. Chandhuri, par exemple, identifie quatre civilisations, différentes mais comparables, dans cet espace :

    - une civilisation islamique ;

    - une civilisation indienne/sanskritique ;

    - une civilisation chinoise et,

    - une civilisation du sud-est asiatique.  

Les cercles de convergences et divergences dessinés par leurs interactions excluent la façade africaine de l’océan Indien parce que, selon Chandhuri, les communautés africaines sont structurées par une logique historique différente qui leur assure l’autonomie par rapport au reste de l’océan Indien12. Dans sa perspective, ces cercles constituent des logiques historiques ouvrant à des modes multiples d’universalisation, dont les caractéristiques principales sont la contingence et l’instabilité. Sheldon Pollock en donne probablement l’illustration la meilleure dans sa réflexion sur l’histoire ancienne de l’Inde précoloniale13, en procédant à une comparaison entre les « imaginations impériales » (imagination of empire) indienne et européenne. La première reposerait sur un « universalisme limité » (finite universalism), qui se décline en des formules politiques universelles tout en reconnaissant le pluralisme culturel et religieux (les multiples Indes) des communautés ; la conception impériale romaine – la référence des empires coloniaux européens –, au contraire, se caractériserait par la centralisation, l’ethnicisation, la racialisation et l’agressivité culturelle et religieuse universaliste. L’imaginaire impérial européen déploie donc, si l’on en croit Pollock, l’imperium romain et son unique urbs au cœur d’un orbis terrarum indiscutable, pour fonder sa mission civilisatrice.

La double perspective ici esquissée impose de prendre en considération, dans la réflexion, aussi bien les lieux que les moments de contacts entre l’Europe et les autres peuples. Les espaces de contact sont des espaces de production de savoirs qui, en inventant ou ré-imaginant l’autre, l’enferment dans une construction épistémologique faisant une large place à son lieu de vie, à ses us et coutumes, avec une mise en scène qui est en même temps une mise en sens réduisant le monde à l’univers du réalisateur/explorateur. Mises en scène et en sens qui ont subi et continuent de subir des révisions depuis le moment fondateur de la longue période coloniale – moment qui inaugure la modernité : la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb.

La bibliothèque des empires et le récit de la modernité universelle occidentale restent hégémoniques sur la scène mondiale14. Les violentes actions militaires demeurent les modes dominants de détermination de ce qui compte dans l’histoire collective de l’humanité :

  • L’idée de progrès justifie toujours l’imposition de la démocratie à d’autres sociétés, y compris par des moyens militaires ;
  • La division du monde entre les peuples avancés (développés) et civilisés d’un coté et les peuples primitifs et barbares de l’autre, n’a pas été abandonnée. En attestent, le discours du President français, Nicolas Sarkozy à Dakar, les arguments relatifs à l’entrée de la Turquie dans l’Union Européenne et les débats sur la bonne gouvernance, les droits des femmes…
  • La nature laïque de l’unique modèle historique universel produite par la trajectoire des nations chrétiennes occidentales qui est imposée comme la voie unique de réalisation de la modernité domine le discours politique occidental.
 

Face à cette situation, aux approches senghoriennes d’une rénovation de l’universel par le dialogue et le respect de la diversité des cultures, s’ajoutent de nouvelles conceptualisations qui mettent en exergue, des « modernités multiples, alternatives, vernaculaires, indigènes… » et d’autres « raisons ». Est-il possible d’imaginer l’humanité de manière inclusive alors que toute l’histoire de l’humanité est celle de l’affirmation de soi et de l’exclusion de l’autre, construit comme différent ou hostile?  La dialogue est-il possible et à quelles conditions ? Dans ce cadre, il serait intéressant de reprendre de manière critique la proposition de Susan Buck-Morss, s’approprier « solidement l’idée d’un universel humain soustraite au contrôle exclusif et discriminatoire d’une communauté politique, religieuse, ethnique, sociale ou d’une civilisation. Une histoire universelle qui s’engage dans une double libération, de l’histoire et de l’imagination morale bornées par une trajectoire spécifique. En effet, en se libérant du passé, on se libère de soi-même, en se plaçant hors des territoires exclusifs de cultures autochtones, pour privilégier non pas l’expérience individuelle, mais l’expérience tout simplement humaine15. 

Dans la perspective de Gandhi, il ne s’agit pas de supprimer ou de transcender les antagonismes ou l’hétérogène, mais de développer des protocoles distincts de relations sociales et politiques qui se fondent sur la reconnaissance de la différence absolue et l’instauration de l’égalité parfaite16. Pour ce faire, la traduction s’impose comme la règle absolue d’un universel qui inclut et différencie. C’est la conclusion très optimiste de l’histoire de l’Océan Indien que nous propose Sugata Bose : Même si l’histoire du monde moderne peut être interprétée, dans une large mesure comme le produit des transactions d’universels pluriels et en compétition, il est possible d’aménager un espace de convergence en recourant à des traductions intelligentes. Ce fut précisément cette mission de production de langues hybrides et polyphoniques que les peuples de l’arène interrégionale ont merveilleusement accomplie – par la traduction – au cours des phases archaïque et moderne de la globalisation. Ne demeure-t-il la seule chance d’un nouveau cosmopolitisme » 17 

Traduire, c’est reconnaître d’une part, la différence et d’inviter le mouvement vers l’autre. C’est accepter que la différence est une ouverture. C’est refuser de dresser des frontières. Au contraire, la traduction invite « au dialogue des cultures »18 pour reprendre une formule chère à Léopold Sédar Senghor. En affirmant l’égale dignité de toutes les cultures et en disjoignant expressions culturelles et droits et responsabilités citoyens, de nombreux leaders politiques et intellectuels non-européens, ont travaillé (continuent de travailler) à délester l’universalisme de sa prétention de neutralité culturelle, de sa vocation pédagogique et de sa légitimité d’unique dispensatrice de civilisation, modernité, développement et démocratie. Ils en élargissent les territoires, les manifestations, les ressources, les scripts et les acteurs, en le requalifiant comme un récit propre à l’Europe et à son histoire. Ainsi la reconnaissance des identités culturelles, nomades ou non, de l’hybridité et de la créolité, les controverses relatives aux essentialismes, anciens ou nouveaux ne paraissent pas porter nécessairement le conflit, ni expliquer les manœuvres guerrières, terroristes et génocidaires de l’histoire contemporaine. Elles portent aussi en elles des histoires qui ressurgissent pour réinventer un universalisme de la rencontre, du dialogue et des transactions. Un universalisme construit à partir de toutes les histoires et qui les revendique toutes, autant les convergences et les divergences, les emprunts, les rejets et les manipulations, d’une communauté à une autre.

    * Texte prononcé à Kairouan (Juin 2009)